Archive dans 2021

Négociations en entreprise : les limites du distanciel

Droit social. La continuité dans le changement : voilà ce que nous a appris la crise sanitaire en matière sociale. Car les salariés qui étaient déjà habitués à travailler ensemble n’ont pas connu de grandes difficultés à passer à la visioconférence ou à la téléconférence, en bousculant parfois les processus officiels avec des groupes WhatsApp informels, mais plus réactifs.

Idem en matière collective, qu’il s’agisse de consultation du comité social et économique (CSE) ou de négociation avec les délégués syndicaux. Quand les relations sociales reposaient sur la confiance, le dialogue social s’est poursuivi, parfois même amélioré : 9 000 accords d’entreprise directement liés à la crise ont été signés en 2020, avec en mai 2020 des plans de déconfinement coconstruits.

Mais lorsque à l’inverse les relations sociales étaient tendues, la crise sanitaire a souvent cristallisé les tensions, les portant devant le tribunal judiciaire pour trancher les différends. Et comme en matière de télétravail, nombre de blocages sont tombés. Côté entreprise, combien de directeurs des relations sociales auraient imaginé il y a un an pouvoir réunir exclusivement à distance leur CSE et ses nombreux membres ?

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Pourtant, si les délégués étaient bien équipés en matière informatique et que les échanges intervenaient en visioconférence avec caméra ouverte, les réunions, souvent plus nombreuses, ont pu être normalement menées. Avec parfois une efficacité supérieure au présentiel : car en période de grave crise où il faut décider rapidement, les postures et les longs préambules passent beaucoup, beaucoup moins bien. Mais aussi car nombre d’entreprises ont joué le jeu d’une transparence économique et sociale maximale pour faciliter le dialogue.

Mode hybride et bon sens

Faut-il alors faire de ces réunions à distance la norme, avec bien sûr d’excellentes raisons : aujourd’hui réduire la contagion, demain la pollution… et les coûts parfois importants liés à ces réunions ? Bien mauvaise idée que ce mode binaire du « tout ou rien » : vive le mode hybride et le bon sens, s’il s’agit par exemple d’une réunion mensuelle de brève durée, sur des sujets non conflictuels…

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A l’inverse, l’ordonnance du 25 novembre 2020 visant le fonctionnement du CSE pendant l’état d’urgence sanitaire a légitimement créé un droit d’opposition aux conférences téléphoniques ou aux messageries instantanées sur les sujets les plus importants pour la communauté de travail : licenciements collectifs, accord de performance collective, dispositif spécifique d’activité partielle de longue durée (APLD) : au minimum vingt-quatre heures avant la réunion, une majorité des élus du CSE pourra s’y opposer.

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« L’Economie féministe »: relire l’économie sans biais sociaux

Livre. Voilà un ouvrage dont le titre même interpelle et peut sonner comme un oxymore : comment une science peut-elle être associée à un engagement militant ? Avec L’Economie féministe, Hélène Périvier revient sur les origines de la fausse neutralité des concepts et analyses de l’économie, pour mieux mettre au jour les ressorts d’une organisation sociale issue du modèle patriarcal.

Construite par des hommes, pour être au service d’une société dirigée par des hommes, l’économie est « aujourd’hui encore l’une des sciences les moins féminisées », tranche l’économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

Considérant que les réflexions en matière de justice sociale et d’éthique altèrent la dimension scientifique de leur discipline naissante, les économistes de la fin du XIXe siècle s’en sont progressivement détournés, laissant à la philosophie morale le soin de traiter ces questions.

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« Cette quête d’une neutralité idéalisée a conduit les économistes à unifier leurs approches en s’appuyant sur un langage commun. Plus didactique et formalisé, le paradigme néoclassique était un candidat idéal pour dominer la discipline. Ce cadre cohérent répond à des questions relatives aux échanges marchands, mais il n’a pas été conçu pour comprendre les échanges d’une autre nature (comme le travail domestique ou le travail familial). » En supposant que l’individu est libre de ses choix, on nie l’existence de rapports de force et de domination et on écarte le rôle des normes sociales dans les décisions individuelles.

Coût et efficacité

Pourtant, reconnaître que les économistes sont eux aussi soumis à l’influence des biais sociaux, culturels et politiques ne réduit pas l’objectivité de cette science sociale. « Il ne s’agit pas d’opposer comme seule réponse à une recherche qui se veut neutre et objective un relativisme stérile et dangereux, mais de proposer une autre voie en assumant la conversation scientifique qui découle des désaccords. (…) Loin d’altérer la dimension scientifique de l’économie, l’économie féministe en renforce la rigueur, car elle élargit le champ des controverses et réduit l’emprise de biais sexistes et essentialistes. »

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En retour, l’économie apporte un ensemble de connaissances utiles au féminisme. Depuis les années 2000, certains travaux empiriques cherchent à identifier le coût des discriminations ou le gain en efficacité que l’on pourrait tirer d’une réduction des inégalités entre les sexes. Mais la mesure chiffrée de ces phénomènes « doit s’accompagner d’une réflexion sur la place que l’on accorde aux principes de justice sociale », souligne la directrice du programme de recherche et d’enseignement des savoirs sur le genre.

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Qui recrutera un cadre avant le printemps ?

Carnet de bureau. La courbe des offres d’emploi pour les cadres ne cesse de grimper depuis l’été 2020. Leur nombre a progressé de 18 % entre le troisième et le quatrième trimestre, mais reste inférieur à la situation d’avant la crise : 97 500 annonces ont été publiées au quatrième trimestre contre 117 300 un an plus tôt. Après l’effondrement du premier confinement, qui a durement frappé l’automobile, l’aéronautique et l’Ile-de-France, la prudence est de mise.

Les intentions de recrutement « ne replongent pas au premier trimestre 2021 », mais restent très en deçà du premier trimestre 2020, révèle l’Association nationale pour l’emploi des cadres (APEC) dans son baromètre publié le 3 février. Ce n’est « pas si pire », diraient les Québécois : 11 % des entreprises toute taille et tout secteur confondus prévoient de recruter au moins un cadre avant fin mars. Pour les entreprises de plus de 100 salariés ce taux monte à 41 %. « Ni plongeon ni rebond, c’est plutôt une bonne nouvelle », résume Gilles Gateau, le directeur général de l’APEC.

Pour établir ce diagnostic, 2 000 cadres et 1 000 entreprises du privé ont été interrogées en décembre 2020 par l’APEC. Il y a bien sûr de nombreuses TPE-PME qui gèlent leurs recrutements, et les annonces de plans de départs se poursuivent – ADP, Danone, Michelin, Bridgestone, etc. –, mais les embauches aussi, malgré tout.

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L’anticipation est de plus en plus difficile : moins d’une entreprise sur deux (45 %) se dit capable d’y voir clair sur son niveau d’activité au premier trimestre 2021. Mais 70 % espèrent avoir retrouvé leur situation d’avant crise d’ici la fin de l’année. Les plus grandes organisations étant les plus confiantes. Elles misent sur « les nouveaux marchés, les nouveaux produits et leur transformation numérique », explique l’APEC.

Mauvaise nouvelle pour les jeunes

L’ingénierie, l’informatique, le conseil et la banque-assurance sont les secteurs les plus porteurs, mais l’industrie aussi : 16 % des entreprises industrielles projettent des recrutements de cadres avant fin mars, soit deux fois plus qu’au trimestre précédent. Et 15 % des entreprises de service à valeur ajoutée embaucheront au premier trimestre 2021. « C’est pour la première fois depuis longtemps un peu moins que l’année précédente », remarque Gilles Gateau.

Sans surprise, les quatre fonctions qui concentrent les deux tiers des recrutements envisagés sont les moteurs traditionnels de l’emploi de cadre : l’informatique (20 %), le commercial (17 %), les études et recherche et développement (16 %) et la production industrielle et les chantiers (14 %).

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En rachetant Topshop, Asos symbolise le triomphe de la mode en ligne au Royaume-Uni

Devant un magasin Topshop fermé, à Londres, le 1er février 2021.

L’épidémie de Covid-19 est soudain venue accélérer le triomphe de la mode en ligne au Royaume-Uni. En huit jours, deux enseignes iconiques des commerces britanniques, qui avaient fait faillite ces derniers mois, ont été rachetées par des sites de mode présents uniquement sur Internet. Mais seules les marques ont été sauvées. Les magasins – et leurs 23 000 emplois – n’ont pas trouvé de repreneur.

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Lundi 1er février, le site Asos a acquis pour 265 millions de livres sterling (300 millions d’euros) des marques qui étaient les coqueluches des années 2000 : Topshop, Topman, Miss Selfridge… Autant de joyaux du groupe Arcadia, qui a déposé le bilan en novembre 2020.

Le 25 janvier, Boohoo, un concurrent d’Asos, s’était offert, pour 55 millions de livres sterling, la marque Debenhams, des grands magasins presque bicentenaires.

« Ce n’est pas notre modèle de gérer des boutiques »

Dans les deux cas, Asos comme Boohoo n’achètent que les marques et une partie des stocks. Les magasins vont être vendus à l’unité aux éventuelles enseignes qui osent encore tenter l’aventure de la vente « en présentiel ». « Ce n’est pas notre modèle de gérer des boutiques », explique sans appel Nick Beighton, le directeur général d’Asos.

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Ces deux acquisitions vont avoir une incidence profonde sur la façon dont les Britanniques font leurs courses. Il y a quinze ans, les magasins Topshop étaient le rendez-vous des jeunes adolescentes, qui pouvaient y passer des samedis entiers. Son immense navire amiral d’Oxford Street, au cœur de Londres, était visité par les touristes. L’enseigne était à l’avant-garde de la fast fashion, cette mode inspirée des dernières collections de prêt-à-porter, reproduisant vite et à bas coût les succès du moment.

Le triomphe de Debenhams remontait à plus longtemps. Ses grands magasins étaient les temples de la consommation des années 1980. Leur fermeture marque la fin d’un autre monde, plus âgé, plus provincial aussi.

Gigantesques dividendes

Dans les deux cas, l’arrivée d’Internet n’a pas été le seul facteur de leur échec. Philip Green, le magnat à la tête d’Arcadia, s’est servi de gigantesques dividendes. L’exilé fiscal, enregistré officiellement à Monaco, connu pour ses yachts gigantesques et son langage fleuri, a vidé les réserves du groupe. Son refus d’investir s’est accompagné de son aveuglement face à la concurrence en ligne, lui qui avait commencé en bas de l’échelle en revendant des surplus et des stocks de vêtements abandonnés. De son côté, Debenhams est passé, ces dernières décennies, par une série de repreneurs à courte vue financière, qui ont tous appauvri un peu plus le groupe.

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Covid-19 : dans la zone euro, l’explosion du chômage n’a pas eu lieu

Dans une agence pour l’emploi, à Castrop-Rauxel, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie (Allemagne), en février 2020.

L’immense vague de chômage annoncée au printemps 2020, lors du premier confinement, n’a pas déferlé. Près d’un an après le début de la pandémie de Covid-19, le taux de chômage dans la zone euro n’est passé « que » de 7,4 % en décembre 2019 à 8,3 % un an plus tard, selon les données publiées, lundi 1er février, par Eurostat, l’agence européenne des statistiques.

« Normalement, le chômage et le produit intérieur brut [PIB] sont fortement corrélés. Quand on a vu qu’on parlait d’une chute de 25 % du PIB pour 2020, on a pensé que le chômage allait passer à 15 % au moins », se rappelle Andrew Kenningham, économiste au cabinet de conseil Capital Economics. Finalement, il n’a progressé que de 1 point, touchant 1,5 million de personnes supplémentaires. « La situation est évidemment inquiétante, mais elle est bien meilleure que pendant la crise de la zone euro », estime M. Kenningham.

L’explication vient presque intégralement de la mise en place du chômage partiel, qui a amorti le choc. Inspirés de l’expérience allemande, qui avait limité les dommages sociaux lors de la crise de 2008, tous les grands pays de la zone euro ont décidé de payer directement une large partie des salaires, afin de maintenir l’emploi.

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Reflux très rapide

Le résultat est plutôt probant. En France, jusqu’à 31 % des emplois ont été subventionnés pendant la première vague de Covid-19, avant de redescendre à 5 % à la fin de l’été, puis de remonter à environ 11 % aujourd’hui, avec le retour des restrictions. L’Espagne, l’Allemagne et l’Italie ont suivi la même trajectoire, montant à près de 20 % pour revenir à environ 5 % actuellement. Ce reflux très rapide, alors que le taux de chômage est resté relativement stable, montre que le mécanisme a joué son rôle : la grande majorité des employés qui ont bénéficié du chômage partiel ont retrouvé leur emploi.

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Mais derrière ces chiffres rassurants commencent à émerger des tendances inquiétantes, signe d’un marché du travail en difficulté. D’abord, il reste quelque 7 millions de chômeurs partiels rien qu’en additionnant ceux de France, d’Italie, d’Espagne et d’Allemagne. Après la pandémie, combien finiront par retrouver un emploi ? « Prenez les agences de voyages. Après les confinements, vontelles rouvrir ? Et combien de leurs employés retrouveront alors leur travail ? », interroge Felix Huefner, économiste à UBS. La même question peut se poser pour les emplois dans les magasins, alors que le grand public a pris l’habitude de commander en ligne, par exemple.

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« #Etudiantsfantômes est un hashtag de détresse »

Sur les applications qui servent aux cours à distance en raison de la pandémie, s’est installé un « dialogue des aveugles », se désole Michèle Cros, professeure à l’université Lumière-Lyon-II qui, dans une tribune au « Monde », invite à dépasser cette fatalité en renouvelant ce plaisir d’enseigner et d’apprendre.

Lien confirmé entre les meurtres d’une DRH et d’une conseillère de Pôle emploi

Des fleurs ont été déposées devant une usine de l’entreprise FAUN, le 29 janvier 2021, à Guilherand-Granges, au lendemain du meurtre de l’une des directrices des ressources humaines de l’entreprise.

L’enquête sur les meurtres d’une conseillère Pôle emploi et d’une directrice des ressources humaines (DRH), tuées jeudi 28 janvier par un homme de 45 ans dans la Drôme et l’Ardèche, avance. Le parquet de Mulhouse a confirmé lundi 1er février un « lien » entre ces meurtres, perpétrés jeudi, et une tentative d’assassinat d’un DRH mardi dernier à Wattwiller (Haut-Rhin). L’ADN du suspect a ainsi été retrouvé sur les différents lieux du crime, a précisé la procureure de la République de Mulhouse, Edwige Roux-Morizot, lors d’une conférence de presse.

« Le suspect est mutique, il ne parle pas du tout sur les faits, ne répond pas aux questions », avait fait savoir vendredi matin le procureur de la République de Valence, Alex Perrin, précisant que sa garde à vue avait été prolongée de vingt-quatre heures.

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Agences Pôle emploi fermées

Après le meurtre de leur collègue de 53 ans, les agents de Pôle emploi ont prévu d’observer une minute de silence, vendredi. Par ailleurs, les quelque 900 agences Pôle emploi sont fermées au public, a fait savoir l’opérateur public. Pôle emploi rappelle dans son communiqué qu’« un soutien psychologique a d’ores et déjà été proposé aux agents ».

De son côté, la fédération CFDT-Protection sociale-Travail-Emploi se dit « légitimement inquiète » face à « cette tragédie d’une violence inouïe ». Le syndicat réclame « des actes forts » pour « répondre aux craintes des salariés de Pôle emploi » et note que « même si cet acte effroyable est exceptionnel, il montre aussi les difficultés que rencontrent les salariés de Pôle emploi dans l’exercice de leur activité professionnelle au quotidien, en particulier dans l’accueil du public ».

« On est tous choqués, dans la colère et le recueillement », a commenté Nathalie Delbaere, déléguée du syndicat CGT, ajoutant : « Il faut que notre direction s’interroge maintenant pour savoir ce qui s’est passé car la maltraitance des demandeurs d’emploi entraîne la maltraitance des agents. »

« Ce qui s’est passé là n’est jamais arrivé (…) Il peut y avoir évidemment des demandeurs d’emploi qui sont dans la détresse, qui peuvent parfois avoir des agressions verbales sur des agents de Pôle emploi, mais là je pense qu’on est dans autre chose », a jugé sur place la ministre du travail, Elisabeth Borne.

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Le Monde avec AFP

Ryanair craint la plus mauvaise année de son histoire

Un Boeing 737-800 appartenant à la compagnie aérienne Ryanair en approche de l’aéroport Paris-Beauvais, en septembre 2018.

Déjà largement affaiblie par l’effondrement du trafic aérien depuis le début de la crise sanitaire et la fermeture de certaines frontières, la compagnie aérienne à bas coûts Ryanair s’attend à connaître la pire année de son histoire.

Alors que le transporteur irlandais avait réalisé un bénéfice net de 88 millions d’euros au troisième trimestre de son exercice précédent, il enregistre, au troisième trimestre de l’exercice actuel, une perte nette atteignant 306 millions d’euros.

Par ailleurs, son chiffre d’affaires trimestriel a plongé de 82 % et la compagnie n’a transporté qu’un peu plus de huit millions de passagers, soit une dégringolade de 78 % en un an. « Nous espérions que les choses continuent de s’améliorer au troisième trimestre, mais, la semaine avant Noël, l’émergence des variants britannique et sud-africain a conduit à de sévères restrictions », explique Michael O’Leary, directeur général du groupe dans une vidéo sur le site Internet de Ryanair.

« Le plus difficile des 35 ans d’histoire de Ryanair »

Selon lui, les confinements et les tests demandés avant de prendre un avion devraient plomber le trafic jusqu’à Pâques. Le transporteur maintient sa prévision d’entre 26 millions et 30 millions de passagers sur l’exercice 2020-2021, qui s’achèvera à la fin de mars. Avant la pandémie, le groupe espérait transporter 155 millions de passagers cette année.

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De ce fait, l’exercice en cours « va continuer d’être le plus difficile des 35 ans d’histoire de Ryanair », selon le communiqué. Le groupe prévoit une perte annuelle qui pourrait s’élever à 950 millions d’euros, tout en précisant qu’il s’agit d’un objectif « prudent ». Pour traverser la crise, la compagnie a déjà supprimé quelque 3 000 emplois, soit 15 % de ses effectifs et imposé des baisses de salaire à son personnel pour éviter les licenciements. Elle a en outre bénéficié au plus fort de la crise sanitaire du dispositif de chômage partiel et d’un prêt de 600 millions de livres (soit près de 680 millions d’euros) des pouvoirs publics britanniques.

Fortement affaibli, le groupe estime cependant que la situation sanitaire devrait s’améliorer grâce au déploiement des vaccins et juge qu’il est suffisamment solide pour émerger de la crise en position de force. Ryanair entend aussi profiter de la faillite d’autres compagnies aériennes moins robustes.

Le Monde avec AFP

L’argot de bureau : « Downsizing », chéri, j’ai rétréci la boîte

Et si réduire les humains à la taille d’une souris permettait de résoudre les problèmes de la planète ? C’est le scénario de Downsizing, un film américain sorti en 2018. En management, c’est plus ou moins la même chose : on tente de réduire les budgets et les effectifs pour sauver sa peau. Le film d’Alexander Payne a connu un échec commercial cuisant : le downsizing d’entreprise sera-t-il aussi impopulaire ?

Cette expression s’est répandue dans les années 1970 pour désigner la réduction de la taille des systèmes informatiques. Dans un autre domaine, la mécanique, le downsizing consiste à limiter la cylindrée d’un moteur pour en diminuer la consommation en carburant, sans affecter sa puissance. En management, c’est la taille de l’entreprise qui baisse, dans le but de réaliser des économies d’échelle et d’améliorer la rentabilité.

Pour la case traduction, le secteur informatique recommande depuis 1993 un vocable qui semble tout droit sorti de la bouche d’un savant fou : la « micromisation » ! Les responsables des ressources humaines parlent plus couramment d’« économies d’échelle » ou de « restructuration ».

Une refonte de l’organisation

Le downsizing n’est pas un laser game, c’est une tâche crève-cœur. Il s’agit de se séparer d’une partie de son entreprise, de ses locaux, de son personnel. Faute de rayon laser magique, c’est une branche d’activité qui est coupée, une filiale fermée, des postes hiérarchiques jugés superflus supprimés. Adieu, Monsieur le sous-directeur adjoint de la section comptabilité de la sous-direction régionale…

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Finalement, le downsizing n’est pas très éloigné du plan social : « il faut dégraisser le mammouth », pour reprendre l’expression du ministre de l’éducation nationale de 1997, Claude Allègre. Mais, plus qu’une vague de licenciements, le downsizing est une refonte de l’organisation et des méthodes de production à long terme. Le préfixe « down » n’annonçant rien de bon, certaines entreprises préfèrent parler de « rightsizing » : un ajustement des coûts au niveau de l’activité, car, après tout, ce n’est pas la taille qui compte.

Un changement de cap ou un déclassement?

Ce genre de coupe n’envoie toutefois pas toujours les bons signaux : malgré des justifications habiles de cette « restructuration », les marchés peuvent voir dans les économies d’échelle d’une entreprise la confirmation de ses difficultés.

Demandez à Toblerone, qui a appliqué en 2016 le downsizing au marketing : ils ont réussi à réduire la taille de leurs barres chocolatées sans toucher au prix… avant que le public s’en rende compte. Enlevez du chocolat dans votre entreprise, et vous perdrez peut-être vos clients…

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