Archive dans avril 2021

PSE, plan de départ volontaire, liquidation… Ce que veulent dire les mots des plans sociaux

“A la bonne table”, restaurant qui emploie dix salariés à Clermont-Ferrand.

Le mouvement des « gilets jaunes », fin 2018-début 2019, a particulièrement fragilisé le restaurant de Mattea Jublin, situé dans le centre-ville de Clermont-Ferrand. Chaque samedi, les manifestants défilaient et les clients étaient aux abonnés absents. En grave difficulté financière, la chef d’entreprise a alors cherché à tout prix à éviter la cessation de paiements (lorsqu’une entreprise n’est plus en capacité de payer ses différentes dettes, comme les salaires, les emprunts financiers, les fournisseurs…) et les licenciements.

Elle a pour cela fait, en avril 2019, une demande de procédure de sauvegarde auprès du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, qui a été acceptée par le juge au vu de la situation. Cette procédure, qui doit durer au maximum six mois (et peut être prolongée jusqu’à dix-huit mois), vise à donner du temps à une entreprise, comme celle de Mmme Jublin, pour qu’elle se réorganise, afin qu’elle maintienne son activité, qu’elle conserve les emplois et qu’elle apure ses dettes. L’ouverture de cette procédure de sauvegarde permet également la suspension automatique des poursuites individuelles contre l’employeur en difficulté et la suspension des échéances des dettes.

Durant cette période, Mmme Jublin a dû effectuer un bilan économique et social de son restaurant en difficulté et un inventaire des biens a également été lancé. Par ailleurs, la restauratrice a remis à l’administrateur judiciaire et au mandataire judiciaireredressement judiciaire ou en liquidation judiciaire.

L’entreprise se porte bien, donc M. Labaigs ne peut pas ouvrir un plan de départs volontaires ou un plan de sauvegarde de l’emploi qui doivent être justifiés par des difficultés économiques. Il choisit alors l’option de la rupture conventionnelle collective (RCC). Ce dispositif ne correspond pas à un licenciement car il ne peut être imposé de force à un employé. Il doit en effet se faire d’un commun accord entre l’employeur et les employés qui y ont recours. 

Pour ouvrir cette RCC, M. Labaigs doit d’abord conclure un accord collectif dit « majoritaire », c’est-à-dire avec des syndicats ayant recueilli au moins 50 % des voix lors des dernières élections professionnelles. Dans cet accord, l’employeur doit mentionner le nombre maximal de départs souhaités, les types d’activités et les postes sur lesquels les départs sont envisagés. Il doit également préciser les conditions que doit remplir un salarié pour avoir recours à cette procédure. Celles-ci doivent être objectives – type de poste occupé, ancienneté dans l’entreprise, service dans lequel l’employé se trouve… -, et non-discriminatoires. Il est par exemple impossible de mentionner l’âge comme critère pour avoir accès au dispositif. 

Pour avoir accès à une RCC, le salarié doit remplir une condition : avoir un projet pour la suite de sa carrière – proposition d’un CDI ou un CDD de longue durée dans une autre société, projet de reconversion, de création d’entreprise, etc… Lorsqu’un employé accepte d’en bénéficier, il signe avec son employeur une rupture conventionnelle individuelle et peut bénéficier d’indemnités plus intéressantes qu’une rupture conventionnelle classique car l’accord signé avec les organisations syndicales comporte en général des dispositions avantageuses afin d’inciter les salariés à partir.

Pour vous, la pause-café en entreprise est indispensable ? Témoignez

Serré ou allongé ? Avec ou sans sucre ? Et vous, vous le prenez comment votre café ? Peu importe la façon dont on la consomme, cette boisson est omniprésente en entreprise. A tel point que la pause-café est pour de nombreuses personnes un moment-clé, voire un véritable rituel social, qui rythme leur journée de travail. C’est votre cas ? Racontez-nous.

Que vous apportent vos pauses-café ? Comment percevez-vous ces moments ? S’agit-il d’un temps d’échange et de discussion entre collègues. Si oui, de quoi parlez-vous ?

Est-ce un réel temps de « pause » dans le travail, un moment où vous vous videz la tête ? Ou bien, au contraire, profitez-vous de ce moment pour aborder des questions de travail de façon plus informelle avec vos collègues ?

Vous arrive-t-il de faire des pauses-café avec vos supérieurs hiérarchiques ?

Vous arrive-t-il de faire une pause-café uniquement pour le lien social et de consommer un café par « réflexe », sans en avoir réellement envie ? Ou bien consommez-vous d’abord cette boisson pour le coup de fouet que la caféine apporte et/ou pour le plaisir gustatif ?

Avec la pandémie de Covid-19 et la généralisation du télétravail, les pauses-café entre collègues vous manquent-elles ? Avez-vous le sentiment d’y avoir perdu en cohésion de groupe ? Avez-vous trouvé des alternatives pour maintenir ce lien entre collègues ?

Votre témoignage, que nous lirons avec attention, pourra être utilisé dans le cadre d’un article à paraître dans Le Monde sur ce sujet. N’oubliez pas de mentionner un numéro de téléphone ainsi qu’une adresse électronique : nous pourrions être amenés à vous contacter pour des précisions. Votre anonymat pourra être préservé si vous en faites la demande.

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Une réforme de l’assurance-chômage chaotique

L’aveu a de quoi laisser songeur. Le gouvernement vient de reconnaître que la réforme de l’assurance-chômage, applicable à partir du 1er juillet, engendre des « effets non voulus », susceptibles de pénaliser plusieurs catégories d’actifs, parmi lesquelles les femmes en congé maternité et les salariés au chômage partiel. « Ce n’était pas du tout l’objectif », a assuré, le 15 avril sur CNews, la ministre du travail, Elisabeth Borne.

Le plus intrigant dans ce mea culpa tient au moment où la ministre du travail dit avoir découvert ces incidences indésirables : c’était « quelques jours » avant la publication du décret du 30 mars sur les nouvelles règles relatives à l’indemnisation des demandeurs d’emploi. Les syndicats de salariés, eux, soutiennent, avec des preuves à l’appui, qu’ils avaient alerté beaucoup plus tôt Mme Borne. Peu importe. Quand l’Etat transforme un dispositif de protection sociale, c’est à lui d’anticiper les impacts. S’il n’y parvient pas, ses contradicteurs ont alors beau jeu d’instruire un procès en incompétence, ce dont Laurent Berger ne s’est pas privé : le numéro un de la CFDT a déclaré que le gouvernement avait « fait n’importe quoi » sur ce dossier.

Douche glacée

Selon toute vraisemblance, ce « couac » va conduire l’exécutif à élaborer un nouveau décret pour amender celui du 30 mars. Un texte de plus, en somme, pour une réforme qui a déjà été beaucoup réécrite et qui n’a plus grand-chose à voir avec les promesses de campagne d’Emmanuel Macron. Il n’avait pris que deux engagements : ouvrir l’assurance-chômage aux indépendants et aux salariés démissionnaires qui ont un projet professionnel ; combattre la précarité sur le marché du travail à l’aide d’un bonus-malus qui diminue les cotisations des entreprises où les effectifs sont stables et qui, à l’inverse, majore les prélèvements pour les employeurs abusant des contrats courts.

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Mais le pouvoir en place est finalement allé plus loin. Il a voulu contribuer à la résorption de la dette du régime (environ 34 milliards d’euros au début du quinquennat) et répondre aux attentes des patrons, qui se plaignaient de ne pas trouver de main-d’œuvre alors qu’il y avait plus de 3,5 millions d’inscrits à Pôle emploi. C’est ainsi qu’une première version de la réforme a vu le jour avec un décret de juillet 2019. Un texte synonyme de douche glacée pour les personnes privées d’activité : durcissement des conditions pour avoir droit à une indemnisation, dégressivité des prestations pour les demandeurs d’emplois de moins de 57 ans disposant des plus hauts revenus, changement du mode de calcul qui a pour effet de diminuer le montant mensuel de l’allocation versée aux précaires alternant petits boulots et période d’inactivité. Le but était d’inciter les chômeurs à accepter des postes durables.

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Des livreurs à vélo ubérisés reprennent leur destin en main

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Publié aujourd’hui à 00h43

Il y a une vie après Uber Eats ou Deliveroo. On le comprend vite en pénétrant chez Olvo, une coopérative de livraison à vélo cargo créée par d’anciens livreurs des plates-formes numériques. Dans son local animé de 1 000 m2, à Paris, on passe d’un lieu de stockage des commandes à un autre, réfrigéré, avant d’arriver dans les rayons d’une épicerie en ligne. Plus loin, il y a l’atelier de réparation des vélos-cargos, qu’Olvo assemble sur place et vend aussi, et encore d’autres espaces, sous-loués à des entreprises. La coopérative emploie trente-quatre salariés, dont vingt sont sociétaires.

De son bureau, Jeremy s’occupe de la régulation des livreurs, à Paris, le 19 avril.

Parallèlement à l’essor des ventes de la petite reine et de la livraison à domicile, provoqué par la crise sanitaire, des coopératives de cyclo-logistique fleurissent un peu partout. « C’est un modèle encore en construction, dans lequel nous insistons sur la qualité de l’emploi, qui n’existe pas dans les plates-formes numériques » recourant à des microentrepreneurs, souligne Fatima Bellaredj, déléguée générale de la Confédération générale des sociétés coopératives et participatives – les SCOP –, qui accompagne les porteurs de projets. Pour les aider, cette organisation a créé, cette année, CoopVenture, un fonds d’investissement destiné aux coopératives, notamment numériques, doté, pour le moment, de 4,5 millions d’euros.

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Ces projets sont presque tous lancés par d’anciens livreurs « ubérisés », désireux de reprendre, collectivement, la main sur leur travail, de se salarier et de participer à la prise des décisions, selon la règle « un homme, une voix ». « L’objectif est de lutter contre la précarisation du métier, de sauver des livreurs de l’ubérisation », explique Paul Roudaut, ancien livreur chez Take Eat Easy, la plate-forme belge qui a fait faillite en juillet 2016, et cogérant élu d’Olvo avec Leeroyd Levi, le cofondateur, qui est, lui, un ancien du britannique Deliveroo.

D’autoentrepreneur à salarié

Pour le moment, le nombre de ces SCOP reste modeste. Elles sont une douzaine en France. « Une dizaine de porteurs de projets par trimestre viennent frapper aux portes des unions régionales des SCOP pour être accompagnés, précise Mme Bellaredj. Et une trentaine de structures sont en train de passer du statut d’association à celui de coopérative. Il y a un véritable élan. »

Un livreur ajuste son vélo à côté d’employés en pause, à Paris, le 19 avril.

Pour commencer, certains collectifs créent, en effet, une association de préfiguration, où les livreurs passent progressivement d’autoentrepreneurs à salariés, comme chez Naofood, à Nantes. Née en novembre 2018, elle réunit 12 livreurs de repas de restaurants sélectionnés. « On se prépare au passage en coopérative, explique Guillaume Blanchet, cofondateur de Naofood. Travailler ensemble, se faire confiance, cela s’apprend. » Aujourd’hui, l’association a un salarié et compte en avoir « huit ou neuf en mai ».

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L’indemnisation des chômeurs en fin de droits prolongée jusqu’à fin mai

Alors ministre de la transition écologique et solidaire, Elisabeth Borne sort d’un conseil des ministres, à l’Elysée, le 24 juin 2020.

Face au prolongement de la crise sanitaire, les mesures de soutien sont reconduites. Les chômeurs en fin de droits verront leur indemnisation à nouveau prolongée jusqu’à la fin mai, a annoncé, lundi 19 avril, la ministre du travail, Elisabeth Borne.

« Depuis fin octobre, on prolonge les droits des demandeurs d’emploi qui sont arrivés en fin de droits. Je vous annonce aujourd’hui qu’on va à nouveau prolonger les droits de ces demandeurs d’emploi jusqu’à la fin mai », a déclaré la ministre sur France Inter.

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700 000 demandeurs d’emploi concernés

Cette prolongation concerne les chômeurs arrivés en fin de droits (allocation de retour à l’emploi ou allocation de solidarité spécifique) depuis le 30 octobre. Depuis cette date, « c’est près de 700 000 demandeurs d’emploi » qui ont bénéficié de cette mesure pour un coût « de 2,5 milliards d’euros », a-t-elle ajouté.

Le décret sur la réforme de l’assurance-chômage du 31 mars a en principe déjà acté cette prolongation jusqu’à la fin du mois de juin mais la ministre la confirme oralement de mois en mois au vu de l’évolution de la crise.

Cette prolongation pourra être interrompue le cas échéant fin mai, par arrêté, en cas d’amélioration de la situation. La prolongation exceptionnelle des droits à l’assurance-chômage avait déjà été adoptée pendant le premier confinement, qui avait duré trois mois, du 17 mars au 10 mai.

Les intermittents du spectacle ont eux bénéficié de la prolongation spécifique de leurs droits jusqu’au 31 août 2021.

Lire l’entretien : « Les demandeurs d’emploi concernés vont avoir un lourd sentiment d’injustice »

Le Monde avec AFP

« Si on m’avait dit que je travaillerais au calme dans cet endroit paradisiaque… » : en Thaïlande, un éden pour les télétravailleurs sans frontières

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Publié aujourd’hui à 00h43

Un casque sur les oreilles, les yeux rivés sur l’ordinateur, Jonathan Dizdarevic est concentré sur son écran : cet ingénieur en informatique, Français d’origine bosniaque, travaille d’arrache-pied sur le développement d’une application VPN, réseau privé virtuel qui permet d’établir une connexion Internet sécurisée. L’air est si chaud, si moite, à peine rafraîchi par un ventilateur, que ce grand blond de 33 ans a tombé la chemise. Derrière lui, un paysage paradisiaque : une plage à la splendeur de carte postale, sable blanc sur horizon bleuté, la « zen beach » où une foule d’exilés volontaires vient chaque soir admirer le soleil rouge sang qui s’enfonce dans le golfe de Thaïlande. Un peu plus loin, il y a même une zone réservée aux nudistes.

Jonathan Dizdarevic, 33 ans, de nationalité française, travaille sur le développement d’une applcation VPN. Ici le 5 mars 2021, au Zen Hub, espace de coworking dans l'île de Koh Phangan, en Thaïlande.

C’est un après-midi tranquille sur l’île de Koh Phangan, l’une des places fortes mondiales des « nomades numériques », expression désormais convenue pour désigner tous ces jeunes en errance sur la planète, ordinateurs portables en bandoulière, prêts à travailler n’importe où, au gré de leurs envies. Ils ont la trentaine, la quarantaine pour les plus âgés, et ce sont des gens du voyage d’un genre nouveau : les errants de l’univers éternellement mouvant des écrans sans frontières.

De la fuite dans les idées

La pandémie a précipité les choses : poussés par les vents mauvais du Covid-19, les digital nomads – l’expression anglaise que tous utilisent pour se désigner – ont vu leurs rangs s’épaissir. Certains, tels des naufragés, ont échoué à Koh Phangan. Ils ne sont toujours pas repartis ; ils y attendent des jours meilleurs, quand ils pourront de nouveau parcourir la planète. « Après avoir travaillé à Paris comme responsable technique dans une boîte de développement numérique, puis continué par la Californie, le Mexique, la Colombie, les Canaries, Hongkong et Singapour, j’ai réalisé que la liberté n’a pas de prix », témoigne Jonathan Dizdarevic. La route a été longue, mais il a fini par se « poser ». Même si ce refuge asiatique n’est pas sa destination finale, l’essentiel, à ses yeux, est d’avoir échappé à l’enfer urbain des grandes villes d’Occident et d’Extrême-Orient : « Je ne me sentais pas à ma place dans le monde du travail ordinaire, et je n’en pouvais plus de dépendre des idées des autres : j’ai terminé en burn-out et j’ai fui. »

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Burn-out, dépression, lassitude de la vie dans le « monde d’avant » des sédentaires stressés… A Koh Phangan, certains de ces nomades reviennent de loin. Sophie Vaxelaire, par exemple : une brune de 30 ans au sourire rêveur, désormais professeure de yoga. En 2019, elle a quitté son emploi dans un cabinet de conseil en finance du quartier d’affaires de la Défense, près de Paris. « Depuis longtemps, je ne me sentais plus à l’aise », se souvient-elle devant une tasse de thé à la table du café Indigo, un antre numérique où, dans la grande pièce du premier étage, l’on s’assoit sur un coussin devant l’ordinateur dans le silence quasi sépulcral d’une sainte chapelle. « Un jour, j’ai réalisé que je me mettais à écrire des phrases qui n’avaient plus aucun sens, j’étais complètement déphasée. »

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A Belfort, General Electric revoit à la baisse son plan social chez Steam Power

Devant l’entrée principale de General Electric à Belfort (Territoire de Belfort), le 10 octobre 2019.

Ce ne seront pas 238 emplois, mais 144 qui seront finalement supprimés dans l’entité Steam Power de General Electric, à Belfort (Territoire de Belfort). Vendredi 16 avril, la direction du géant américain a indiqué dans un communiqué que « GE Steam Power Systems [avait] échangé de manière détaillée et constructive avec les représentants du personnel sur le projet initial et ses hypothèses. Les discussions menées ont permis de conserver 94 postes. » C’est une première victoire symbolique pour l’intersyndicale formée par la CFE-CGC, la CFDT et la CGT.

Le 8 décembre 2020, GE avait annoncé un Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) chez Steam Power afin de supprimer 238 postes (ingénieurs et cadres) sur un total de 1 788, alors que les carnets de commandes étaient encore bien remplis, « avec une visibilité sur trois ans minimum », relève Laurent Humbert, de la CFE-CGC.

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Le conglomérat américain de l’énergie justifiait alors ces réductions de personnel par son retrait du marché des centrales à charbon neuves et son recentrage sur l’activité nucléaire. Problème : « On n’a plus de projet lié au charbon depuis plus d’un an », observe M. Humbert. « Les effectifs affectés à ce business ont progressivement basculé vers le nucléaire, ce qui a permis d’absorber la grosse charge de travail. »

Situation « intenable dans plusieurs secteurs »

Celle-ci pourrait encore augmenter avec le projet EPR2 d’EDF qui, s’il venait à se concrétiser, prévoit la construction de six nouveaux réacteurs nucléaires en France. GE et l’Allemand Siemens sont sur les rangs pour décrocher ce marché de plusieurs dizaines de milliards d’euros. « On voit mal l’Etat français commander des turbines et des alternateurs chez Siemens, alors qu’il est en train d’œuvrer à la sécurisation de la filière nucléaire française avec le rachat de l’activité de GE », analyse Christian Mougenot, de la CFDT. Dominique Thiriet (CGT) le confirme : « La réduction des effectifs et la perte de compétences-clés seraient extrêmement préjudiciables pour l’avenir. »

Le PSE chez Steam Power s’ajoute à une liste déjà longue de plans sociaux qui ébranlent le site belfortain depuis mai 2019

Les syndicats considèrent que cette nouvelle proposition est « significative, mais pas suffisante », jugeant la situation « intenable dans plusieurs secteurs ». Tous continuent de réclamer la suspension du PSE. Seulement, « on connaît GE », souligne Laurent Humbert. « Ça va être compliqué d’obtenir davantage. A présent, il faut mobiliser les politiques. » A l’instar de ses homologues syndicaux, il réclame la venue à Belfort du ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire.

Le PSE chez Steam Power s’ajoute à une liste déjà longue de plans sociaux – au sein des entités gaz, hydro (barrages) et grid (réseaux électriques) – qui ébranlent le site belfortain depuis mai 2019. « La vision des Américains est court-termiste et purement financière », soupire Christian Mougenot. « GE veut des profits immédiats, quitte, pour cela, à mettre des centaines de salariés à la porte. »

« La contre-mobilisation accomplie par Amazon a contribué à réduire aux yeux des employés le syndicalisme à un prestataire de services »

Tribune. Des deux côtés de l’Atlantique, le vote des 5 805 employés de l’entrepôt Amazon de Bessemer, dans l’Alabama, à propos de leur syndicalisation a suscité une importante couverture médiatique. Il faut dire que ce conflit du travail cristallisait des enjeux importants. Celui des conditions de travail des employés d’Amazon en pleine crise sanitaire : avec pas ou peu de contreparties, ces ouvriers des entrepôts ont été mis à rude épreuve avec l’explosion des commandes, tandis que le patron de l’entreprise, Jeff Bezos, s’est considérablement enrichi.

Celui aussi d’une mobilisation concernant surtout des travailleurs noirs dans un Etat du Sud, s’inscrivant dans le sillage du mouvement Black Lives Matter. L’enjeu, enfin, de la panoplie bien rodée de tactiques antisyndicales portées par des cadres et des consultants spécialisés : jouer sur le périmètre des employés concernés par le scrutin, user d’une communication quotidienne au travail à propos des syndicats le plus souvent erronée, réprimer voire licencier illégalement des militants.

Modes d’action des associations et des ONG

C’est pourquoi cette tentative d’implantation syndicale a reçu de nombreux soutiens, dont en premier chef celle, historique, du président Joe Biden. Mais pour le moment, Amazon reste, à l’instar de Walmart, une entreprise sans présence syndicale, « union free ».

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L’échec de la syndicalisation de ces employés d’Amazon est également révélateur des dilemmes stratégiques et organisationnels auxquels font face les syndicalistes étatsuniens. A bien des égards, ce qui s’est joué à Bessemer illustre les difficultés des syndicalistes à s’émanciper du carcan des relations professionnelles nord-américaines et d’un droit du travail défavorable aux actions collectives des travailleurs, comme en témoigne un taux de syndicalisation très bas à 10,8 % (6,3 % dans le privé).

Pourtant, les syndicalistes n’ont eu de cesse de renouveler leur répertoire d’actions depuis la fin des années 1970. Ils empruntent ainsi, de plus en plus, les modes d’action des associations et des organisations non gouvernementales (ONG) relevant du plaidoyer (sensibilisation des investisseurs des entreprises et campagnes de relations publiques), voire mènent des luttes communes avec ces organisations.

En mobilisant des soutiens extérieurs, mais aussi en mobilisant souvent à distance des lieux de travail et des travailleurs eux-mêmes, il s’agit de nuire à la réputation des entreprises pour que leurs dirigeants accordent de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail aux employés, qu’ils soient syndiqués ou non.

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