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Hugo Huon : « Notre plus grosse victoire, c’est d’avoir obtenu que le gouvernement cesse de dire que tout va bien aux urgences »

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Publié aujourd’hui à 03h06

Il vaut mieux ne pas demander à Hugo Huon s’il a passé une bonne nuit. « C’était l’horreur ! », peste-t-il. Et d’énumérer, en tirant sur une cigarette roulée : « Il y avait de huit à neuf heures d’attente pour voir un médecin. Un mec bourré s’est mis à insulter tous les soignants et a donné un coup de pied à une collègue… »

Bienvenue aux urgences de l’hôpital Lariboisière, près de la gare du Nord, à Paris, l’un des plus gros services de France, l’un des plus exposés à la misère et à la violence aussi. Hugo Huon y est infirmier depuis cinq ans dans l’équipe de nuit. Il y a quelques mois, nul ne connaissait ce jeune homme de 30 ans aux airs d’étudiant rebelle. Depuis qu’il préside le collectif Inter-Urgences, la structure qui représente, en cette rentrée, près de 240 services en grève – soit la moitié des urgences publiques du pays –, il a appris à composer tant bien que mal avec les médias, habitués jusque-là à donner la parole aux seuls médecins urgentistes.

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Hugo Huon a aussi appris à composer avec les attentes de syndicalistes hospitaliers désireux d’étendre à l’ensemble de l’hôpital public ce mouvement sorti renforcé de l’été, avec deux fois plus de services en grève qu’au mois de juin. L’assemblée générale du collectif, qui se tiendra le 10 septembre à Saint-Denis, au lendemain de la présentation officielle du plan ministériel pour « refondre le modèle des urgences », s’annonce à ce titre décisive. Des organisations de médecins hospitaliers ou des soignants de secteurs comme la psychiatrie pourraient à cette occasion choisir de rejoindre les paramédicaux des urgences sur une plate-forme de revendications communes.

A l’été 2018, Hugo Huon fait partie de ceux qui alertent sur les conditions de travail « exécrables » des infirmiers et des aides-soignants, jugeant que la « prise en charge tronquée » à Lariboisière met « en danger » les patients. Quelques mois plus tard, en décembre 2018, c’est dans ce service qu’une patiente est découverte morte, après avoir attendu douze heures sur un brancard. La tempête médiatique passée, l’équipe de nuit obtient deux postes supplémentaires.

« A cotisation égale, ceux du bas de l’échelle sociale profiteront bien moins de leur retraite »

Selon deux élus écologistes dont Yannick Jadot et deux experts du monde du travail qui s’expriment dans une tribune au « Monde », la réforme des retraites mise en œuvre par le gouvernement est socialement injuste car elle ne prend pas en compte les critères de risques professionnels.

Publié aujourd’hui à 10h11, mis à jour à 10h13 Temps de Lecture 4 min.

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« A 35 ans, l’espérance de vie des hommes ouvriers est de 42,6 années contre 49 ans pour les cadres. Celle des ouvrières est de 49,8 ans contre 53 ans pour les femmes cadres » (Photo: Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire aux retraites délégué auprès d’Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, le 18 juillet).
« A 35 ans, l’espérance de vie des hommes ouvriers est de 42,6 années contre 49 ans pour les cadres. Celle des ouvrières est de 49,8 ans contre 53 ans pour les femmes cadres » (Photo: Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire aux retraites délégué auprès d’Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, le 18 juillet). KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Tribune. Même si le gouvernement a décidé d’engager un cycle de « négociations » avec les organisations syndicales et patronales ainsi qu’une consultation citoyenne, le projet de réforme des retraites, présenté en juillet et dont la « justice » serait la pierre angulaire, passe en réalité totalement à côté du sujet, tant l’équité n’est que de façade (« Pour un système universel de retraite. Préconisations de Jean-Paul Delevoye, Haut-Commissaire à la réforme des retraites », juillet 2019, voir lien PDF).

Un système de retraite ne saurait être juste si la première des inégalités, celle liée aux différences d’espérance de vie, n’entrait pas en ligne de compte.

En outre, il est totalement déraisonnable qu’à l’occasion de cette réforme on assiste encore à un recul de l’âge de la retraite – soit sous la forme d’un âge pivot de 64 ans pour bénéficier du taux plein, proposée par Jean-Paul Delevoye, soit sous la forme d’un allongement de la durée de cotisation, annoncée par Emmanuel Macron.

L’une ou l’autre de ces mesures va inévitablement compliquer le maintien dans l’emploi des salariés vieillissants en raison de la pénibilité du travail, incompatible avec l’avance en âge et la santé.

En bonne santé

Ainsi, la volonté affichée de l’exécutif qu’« un euro cotisé doit donner les mêmes droits pour tous » apparaît très réductrice dans la vraie vie pour des milliers de salarié(e)s. Ceux du bas de l’échelle sociale profiteront bien moins de leur retraite alors qu’ils auront cotisé aussi longtemps que les catégories plus favorisées ; de surcroît, ils risquent d’être exclus du monde du travail avant de pouvoir jouir de ce droit ce qui pénalise le montant de leur pension.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Retraites : « L’aspect le plus controversé du nouveau système est celui de l’âge pivot »

Les inégalités d’espérance de vie entre catégories socioprofessionnelles sont désormais bien connues. A 35 ans, l’espérance de vie des hommes ouvriers est de 42,6 années contre 49 ans pour les cadres (source Insee 2016). Celle des ouvrières est de 49,8 ans contre 53 ans pour les femmes cadres. Les écarts sont encore plus marqués si l’on considère l’espérance de vie en bonne santé, c’est-à-dire sans incapacité : 10 ans. Et l’incapacité n’est pas l’apanage du grand âge. Un quart des années à vivre entre 50 et 65 ans le sont avec des limitations d’activité. Avec, là aussi, des différences significatives entre les ouvriers et les cadres, au détriment des premiers.

Le modèle économique d’Uber et de Lyft menacé par la législation californienne

Une loi, qui doit passer devant le Sénat californien dans les prochains jours, contraindrait notamment ces deux plates-formes à salarier leurs chauffeurs, qui ont pour l’instant le statut de travailleurs indépendants.

Par Publié aujourd’hui à 16h20

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L’introduction de Lyft au Nasdaq, célébrée par les équipes de la plate-forme, à Los Angeles, le 29 mars.
L’introduction de Lyft au Nasdaq, célébrée par les équipes de la plate-forme, à Los Angeles, le 29 mars. Mike Blake / REUTERS

Lyft sait se montrer généreux à l’égard de ses clients. A l’occasion du passage de l’ouragan Dorian en Floride, la plate-forme de conducteurs proposait à ses utilisateurs qui auraient besoin d’évacuer la zone des courses gratuites. A l’égard de ses chauffeurs, la société américaine se montre moins généreuse. Avec son concurrent Uber – son allié pour l’occasion –, elle est engagée dans une vaste campagne de lobbying pour contrer une loi qui pourrait contraindre les deux compagnies à salarier leurs chauffeurs en Californie, alors qu’ils ont, pour l’instant, le statut de travailleurs indépendants.

L’enjeu est d’importance. Un tel changement obligerait les entreprises à offrir à leurs chauffeurs nombre d’avantages dont ils sont aujourd’hui privés : salaire minimum, protection sociale (assurance maladie, congé maternité, congés payés), droit de se syndiquer, etc. Tout devrait se jouer dans les prochains jours, quand le texte, adopté en mai par l’Assemblée de Californie, sera présenté au Sénat de l’Etat.

Lire le reportage : A San Francisco, les chauffeurs Uber manifestent : « A chaque course, je consolide leur richesse à mes dépens »

Un projet de loi concurrent

La principale auteure du texte, l’élue démocrate de San Diego Lorena Gonzalez, s’appuie sur une décision de 2018 de la Cour suprême de Los Angeles déterminant les conditions à partir desquelles une société doit considérer ses travailleurs comme des salariés. C’est le cas si la compagnie fixe leurs conditions de rémunération et si leur travail est partie prenante dans le cœur d’activité de la société. Deux points qui s’appliquent à Lyft et Uber.

Conscientes du danger que cela représente pour leur activité, les deux groupes font feu de tout bois

Même si le texte de loi qui est présenté au Sénat californien exclut de son champ d’application une longue liste de professions, Uber et Lyft, eux, restent menacés par son adoption. Conscientes du danger que cela représente pour leur activité, les deux groupes font feu de tout bois. Tribune dans la presse locale, mise en ligne de sites Internet livrant le témoignage de chauffeurs opposés au texte, etc. les éléments de langage sont identiques : les conducteurs sont attachés à garder leur liberté en termes de temps de travail, les usagers auraient beaucoup à y perdre et Lyft souligne que « des centaines de milliers d’emplois » seraient menacées par une telle législation.

Parallèlement, Uber et Lyft ont annoncé qu’ils pourraient mettre 60 millions de dollars (54 millions d’euros) sur la table pour financer un projet de loi concurrent visant à organiser une consultation locale dans le but de créer un statut particulier pour leurs chauffeurs en Californie. La société de livraison de nourriture à domicile DoorDash, également menacée, a proposé d’abonder 30 millions supplémentaires. « Ce n’est pas notre option de préférence, avance Tony West, le responsable de la direction juridique d’Uber. Nous préférerions aboutir à un accord historique, qui serait bon pour les chauffeurs, bon pour l’innovation et bon pour l’emploi. »

Les contractuels au secours de l’éducation nationale

Les défis de l’école 3/5. Face à la crise du recrutement, ces « saisonniers » sont devenus indispensables à l’institution.

Par Publié hier à 11h24, mis à jour à 09h27

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Pour la première fois, Jeanne, 34 ans, aborde la rentrée « sereinement ». Pas de coup de fil à attendre, pas de jours à compter avant que le service des remplacements du rectorat de Paris ne la contacte : lundi 2 septembre, c’est comme fonctionnaire stagiaire que la jeune femme, qui vient de décrocher le concours de professeur des écoles, fera sa rentrée. « Dans ma classe… », souffle-t-elle.

Après quatre années à sillonner les écoles de l’est de la capitale comme contractuelle – c’est-à-dire sans le diplôme, sans le statut d’une enseignante-type –, Jeanne ne cache pas sa joie. « Aller à la pêche aux contrats, pointer le reste du temps chez Pôle emploi, voir sa feuille de paie amputée de 500 euros les mois où l’on ne travaille pas… personne ne peut s’en satisfaire », résume cette ancienne directrice Web dans le marketing, qui témoigne anonymement (comme tous les enseignants cités ici). Son « virage professionnel », Jeanne l’a opéré à l’aube de ses 30 ans. Elle n’en retient pas « que du négatif ». Bien au contraire : « C’est grâce à ce parcours que je sais à quoi m’attendre… Et que je suis sûre d’avoir envie de faire ce métier ! »

Le « job » n’attire plus

Cette envie, Laure, 45 ans, explique aussi l’avoir « chevillée au corps ». Depuis deux ans, cette mère de trois enfants, diplômée en informatique, enchaîne les missions de remplacement de « quelques jours » à « quelques mois » dans des écoles du nord de l’académie de Poitiers. Une académie qui a fait parler d’elle, avant l’été, en organisant un « job dating » pour présélectionner des contractuels. L’initiative a fait réagir les syndicats d’enseignants, qui ont dénoncé une « méthode inspirée du privé » contribuant à diffuser l’image d’un « job au rabais ».

Sauf qu’ils l’admettent eux-mêmes, le « job » n’attire plus. Année après année, ils se confrontent à son manque d’attractivité révélé par une crise du recrutement qui s’est installée dans le temps. Les disciplines dites « déficitaires » sont connues : lettres, mathématiques, allemand… Les « causes » le sont tout autant : les enseignants citent, pêle-mêle, l’« effet ciseaux » des suppressions de postes sous la droite suivies de recréations d’emplois sous la gauche (qui n’en ont pas compensé les effets), l’élévation du niveau de recrutement (à bac + 5), la quasi-suppression de la formation, l’image dégradée du métier, les salaires jugés insuffisants…

Salaires : « Faut-il viser l’égalité ou l’équité des traitements ? »

Dans les entreprises, la demande de transparence sur les rémunérations de chacun correspond à une demande, ambivalente, de justice. Comment traiter cette question, se demande, dans une tribune au « Monde », le consultant Bernard-Marie Chiquet

Publié aujourd’hui à 11h19 Temps de Lecture 4 min.

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« Plus encore que la transparence des salaires, la justice organisationnelle est donc le socle sur lequel bâtir une organisation où règne une perception de justice sociale. »
« Plus encore que la transparence des salaires, la justice organisationnelle est donc le socle sur lequel bâtir une organisation où règne une perception de justice sociale. » Matt Herring/Ikon Images / Photononstop

Tribune. Conscientes que leur modèle organisationnel a vécu, des entreprises pionnières s’interrogent sur la meilleure manière de se réinventer, pour en finir avec le système hiérarchique et faire émerger une organisation impulsée par sa« raison d’être » et animée par des femmes et des hommes autonomes et responsables. Le chemin est long mais l’horizon bien dessiné.

Une transformation qui, néanmoins, se trouve toujours conditionnée par une question récurrente. Celle des rémunérations et de la transparence des salaires. Quelle que soit l’entreprise, son domaine d’activité ou sa taille, la question revient tel un leitmotiv. Elle reste souvent la pierre angulaire de tout travail de transformation.

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Derrière cette question de la transparence des salaires, se jouent des problématiques tout aussi critiques pour l’organisation. Comment valoriser et reconnaître le travail de chacun ? Faut-il viser l’égalité ou l’équité des traitements ? Dans un contexte où beaucoup s’interrogent sur la finalité de l’entreprise, les clés d’une organisation réinventée et d’un nouveau contrat social, la question de la transparence salariale est-elle vraiment à la hauteur des enjeux ?

La transparence des salaires, un tabou

Si cette transparence est une aspiration partagée par beaucoup et un argument pour convaincre et attirer de nouveaux talents, la réalité est souvent bien différente. Le salaire, notamment en France, reste un tabou : dévoiler le salaire de chacun, « ça ne se fait pas ». Vouloir changer les choses c’est, à coup sûr, devoir affronter une forte résistance sociale ; le plus souvent, le statu quo l’emporte.

Dommage, car la transparence des salaires exprime la volonté de l’entreprise de jouer « cartes sur table », d’offrir ce que tous réclament pour se sentir concernés, être partie prenante de l’organisation. Des exemples permettent de démontrer que la transparence salariale non seulement existe, mais fonctionne.

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L’un des meilleurs est sans doute l’entreprise américaineMorning Star, numéro 1 de la sauce tomate aux Etats-Unis. Chaque année, chaque salarié est sollicité pour connaître ses prétentions salariales. Il propose, puis un comité consultatif émet un avis. In fine, c’est le salarié qui tranche et fixe, le cas échéant, le pourcentage de son augmentation… Cependant, cette information est accessible et potentiellement connue de tous dans l’entreprise.

2019 est un bon cru pour les salaires des cadres, 2020 s’annonce bien

La hausse des rémunérations a été supérieure aux prévisions et bénéficie à tous, indique l’étude annuelle Deloitte publiée lundi. Selon le baromètre APEC 2019 publié le 4 septembre, la hausse bénéficie aux cadres de moins de trente ans.

Par Publié aujourd’hui à 08h38, mis à jour à 08h39

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Deux études à deux jours d’intervalle saluent 2019 comme une bonne année pour les cadres. Lundi 2 septembre, le cabinet de conseil Deloitte publiait son étude annuelle sur les rémunérations reflétant la situation d’1,2 million de salariés de plusieurs secteurs dont la distribution, l’assurance, les télécoms et l’industrie de la santé. Mercredi 4 septembre, c’est l’Association pour l’emploi des cadres qui publie son Baromètre de la rémunération des cadres du secteur privé sur la base de 16827 questionnaires envoyés en mars aux clients de l’association.

Deux principaux enseignements ressortent de ces études. D’une part, les cadres ont une solide confiance dans leur avenir proche. « 37 % des cadres [de l’APEC] jugent intéressantes, voire très intéressantes, les perspectives d’évolution de leur rémunération à l’horizon de trois à cinq ans. Ce sont 2 points de plus qu’en 2018 et 9 de plus qu’en 2017 », indique l’APEC. Les jeunes cadres étant les plus optimistes : 63 % des moins de 30 ans sont confiants dans l’évolution de leur rémunération, contre 21 % des 50 ans et plus.

Les cadres demandant une augmentation individuelle sont de plus en plus nombreux, même s’ils savent que tous ne l’obtiendront pas. Leur progression est constante depuis trois ans : ils étaient 48 % en 2019 contre 45 % en 2016. Les premiers bénéficiaires sont les jeunes: « au cours des cinq dernières années, les cadres de moins de trente ans ont vu leur rémunération augmenter le plus vite: +6% entre 2014 et 2018 », rappelle l’APEC.

Augmentations versées en 2019
Augmentations versées en 2019 Deloitte

D’autre part, selon l’étude Deloitte, les hausses de salaires générales et individuelles (mérite et promotion) versées ont été plus fortes qu’annoncées en 2019. L’augmentation médiane des rémunérations en 2019 a été de 2,8% pour les cadres, de 2,6% pour les cadres supérieurs et de 2,4% pour les non-cadres. « Tandis que les entreprises avaient programmé des hausses de l’ordre de 2% à 2,2% », précise Franck Chéron, associé capital humain chez Deloitte.

« Une majorité d’entreprise a souhaité jouer le jeu [de la prime Macron] afin d’accroître le pouvoir d’achat des salariés », indique le cabinet de conseil. 60% des 400 entreprises interrogées ont ainsi versé la prime pour un montant médian de 456 euros. Ce soutien au pouvoir d’achat masque toutefois une réalité très disparate entre les profils très convoités dont les rémunérations s’envolent, jusqu’à +30%, et les situations plus ordinaires.

Enfin les deux études font un zoom sur les inégalités femmes-hommes. Les campagnes de sensibilisation à la réduction des inégalités salariales commencent à se faire entendre. L’obligation de publication de l’index dans les grandes entreprises est passée par là. Dans les entreprises interrogées par Deloitte, les augmentations en 2019 ont été légèrement supérieures pour les femmes (+0,7 point). L’écart salarial reste de 3%. Il varie de 1,5% à 5,6% selon le niveau de responsabilité. « Au rythme actuel, il faudrait encore une dizaine d’années pour atteindre l’égalité salariale », estime M. Chéron.

Manageurs et salariés: tous au musée !

Art et management n’en sont pas à leurs premières amours. En cette période où la gestion d’entreprise est de plus en plus complexe et marquée par une accélération des changements, le regard décalé de l’artiste est perçu comme une nouvelle ressource, explique la journaliste du « Monde », Anne Rodier.

Publié aujourd’hui à 06h45 Temps de Lecture 2 min.

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« Pourquoi une entreprise, aussi riche soit-elle, en vient à payer 12 000 euros par jour pour envoyer vingt cadres supérieurs tester leurs cinq sens ? » (Centre Georges Pompidou, à Paris, architectes Renzo Piano, Richard Rogers et Gianfranco Franchini).
« Pourquoi une entreprise, aussi riche soit-elle, en vient à payer 12 000 euros par jour pour envoyer vingt cadres supérieurs tester leurs cinq sens ? » (Centre Georges Pompidou, à Paris, architectes Renzo Piano, Richard Rogers et Gianfranco Franchini). Susanne Kremer/Sime / Photononstop

Chronique « Carnet de bureau ». Une vingtaine de manageurs sont entrés à Beaubourg par l’entrée des artistes au petit matin. Après une présentation du lieu, Marion Laporte, responsable de l’Ecole pro du Centre Pompidou les conduit au musée d’art contemporain pour quatre face-à-face successifs avec Le Jardin d’hiver, de Jean Dubuffet, l’Aménagement de l’antichambre des appartements privés du Palais de l’Elysée pour le président Georges Pompidou, de Yaacov Agam, Respirare l’ombra, de Giusepe Penone et Plight, de Joseph Beuys.

Les œuvres ont été choisies par un conférencier pour répondre à une problématique posée par l’entreprise cliente. « On part du sensible pour les ramener à leur problématique », explique Marion Laporte. En 2018, 250 personnes ont ainsi suivi les formations art et entreprises créées à l’initiative de Julie Narbey, la directrice générale du Centre Pompidou. Mais pourquoi une entreprise, aussi riche soit-elle, en vient à payer 12 000 euros par jour pour envoyer vingt cadres supérieurs tester leurs cinq sens ?

Parce que plus que jamais la concurrence se fait d’abord par l’innovation. Le numérique s’est largement diffusé, la rationalisation de l’organisation du travail a divisé les tâches à l’extrême. De ce côté, l’entreprise n’a plus grand-chose à gagner en termes d’efficacité. Mais pour l’heure, la créativité individuelle comme collective devient prioritaire. D’où la multiplication des tentatives d’introduire l’art en entreprise non plus seulement pour investir mais pour y intéresser les salariés et d’abord les manageurs.

Les policiers de Scotland Yard

Formations à l’art, atelier de réflexion autour d’une œuvre, one man show sur les problématiques de management (diversité, harcèlement, etc.). Si les manageurs invités à participer arrivent souvent sceptiques, voire narquois, ces formats leur font toucher du doigt les innovations produites par l’approche artistique. Comme chez Orange par exemple, qui a ouvert ses laboratoires de recherche : depuis 2016, l’Art Factory y fait travailler ensemble artistes et ingénieurs. De leur côté, des PME comme Decalab ou l’agence The Creative Tech organisent des petits-déjeuners pour comprendre l’alliance entre l’art, la science et la technologie. Et le gouvernement accompagne la tendance. Le ministère de la culture a lancé en 2018 un programme de quinze résidences d’artistes en entreprise.

Le manageur peut-il gérer le télétravail ?

S’il plébiscite le télétravail en tant que salarié, le manager en redoute les complications pour gérer au quotidien les collaborateurs absents-présents dans une collectivité jalousement égalitaire, explique le juriste Jean-Emmanuel Ray.

Publié aujourd’hui à 06h15 Temps de Lecture 2 min.

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« Depuis sa libéralisation par l’ordonnance du 22 septembre 2017, des centaines d’entreprises ont signé un accord sur ce thème, plébiscité par les salariés, et facteur d’attractivité, mais aussi de fidélisation pour les entreprises. »
« Depuis sa libéralisation par l’ordonnance du 22 septembre 2017, des centaines d’entreprises ont signé un accord sur ce thème, plébiscité par les salariés, et facteur d’attractivité, mais aussi de fidélisation pour les entreprises. » Quentin Hugon / Le Monde

Chronique « droit social ». Le télétravail a le vent en poupe. Depuis sa libéralisation par l’ordonnance du 22 septembre 2017, des centaines d’entreprises ont signé un accord sur ce thème, plébiscité par les salariés, et facteur d’attractivité, mais aussi de fidélisation pour les entreprises. Il fait partie des « nouvelles façons de travailler » (« New Ways of Working ») qui se développent en Europe, permettant de mieux répartir les fruits de la révolution numérique.

Car la classique revendication salariale est aujourd’hui concurrencée par celle des marges de manœuvre au quotidien. Signé le 9 juillet 2019, l’accord mondial du groupe Renault veut ainsi « offrir à ses salariés des modalités de travail plus souples, avec davantage de liberté dans l’organisation des activités. Ainsi les outils technologiques permettent d’associer progrès technique et progrès social ».

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Développement durable, réduction des coûts et de la fatigue des transports, productivité : le télétravail semble cocher toutes les cases. A fortiori pour les jeunes salariés communiquant par écran depuis leurs années de collège, et la puissante 5G qui arrive.

Mais si, hier, le télétravail était une somme de demandes individuelles, émanant de quelques cadres autonomes et donc gérées au fil de l’eau, aujourd’hui sa banalisation exige des règles collectives au niveau de l’entreprise, parfois de chaque service. Car le télétravail peut cristalliser les blocages organisationnels de management vertical à la française, volontiers dans le « j’ordonne et je contrôle », le présentéisme et l’obligation de moyens ; alors que le télétravail exige confiance et autonomie, avec obligation de résultat.

Nestlé France, Airbus

D’où une politique d’expérimentation : au niveau collectif, avec des accords à durée déterminée, un comité paritaire de suivi ; et, au niveau individuel, avec la mise en place de période d’adaptation et de clause de réversibilité, auxquelles le manageur de proximité est très attaché.

Car s’il plébiscite le télétravail en tant que salarié, le manageur en redoute les complications pour gérer au quotidien les collaborateurs absents-présents, y compris en termes d’égalité de traitement dans une collectivité jalousement égalitaire. Lui aussi doit donc être formé, puis accompagné par un incollable « référent télétravail ». C’est lui qui prendra la décision finale, puisque lui seul sait si X a les qualités nécessaires pour télétravailler.

« Faire équipe » : une injonction paradoxale ?

L’équipe n’est pas un groupe comme un autre. Elle est souvent confondue avec le groupe ou le collectif de travail, alors que des distinctions s’imposent, en théorie et en pratique, selon les psychologues Gilles Amado et Paul Fustier.

Par Publié aujourd’hui à 06h00

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« Faire équipe », de Gilles Amado et Paul Fustier. Erès, 336 pages, 16 euros.
« Faire équipe », de Gilles Amado et Paul Fustier. Erès, 336 pages, 16 euros.

Le livre. Le succès des formations au « team building » montre à quel point les responsables souhaitent qu’un esprit d’équipe naisse le plus rapidement possible. Le destin de ces formations risque pourtant d’être précaire : une équipe peut difficilement être appréhendée hors contexte et hors diachronie. Qu’est-ce que ce mot générique, « l’équipe » ? « L’histoire institutionnelle et organisationnelle est là, qui infiltre nécessairement l’ici et maintenant des situations pour constituer des repères fondateurs et énergisants, ou être invoquée au contraire pour maintenir le statu quo », rappellent Gilles Amado et Paul Fustier (décédé en 2016) dans Faire équipe (Erès).

L’ouvrage collectif réalisé à partir de textes publiés dans le n° 14 de la Nouvelle revue de psychosociologie, sous la direction du professeur émérite de psychologie à HEC Paris et de l’ancien professeur de psychologie à l’université Lumière-Lyon-II, se penche sur la spécificité de la notion d’équipe, mais aussi sur ses limites et ses paradoxes. Comment se combinent l’accomplissement de la tâche et les liens qui se nouent entre les membres de l’équipe ?

L’équipe n’est pas un groupe comme un autre. Elle est souvent confondue avec le groupe ou le collectif de travail, alors que des distinctions s’imposent aussi bien théoriquement que dans la pratique. Une équipe n’existe pas d’emblée, elle est à construire et, une fois construite, à réguler de l’intérieur et/ou à l’aide d’intervenants extérieurs. Dans ce cas, une telle intervention ne conduit-elle pas à disqualifier le responsable de l’équipe lorsqu’il y en a un ?

Le cas des navigants aériens

Dans un monde où l’évaluation individuelle du travail se trouve exacerbée, où la tâche primaire est trop souvent mise au service de procédures fétichisées, l’appel à l’équipe ne représente-t-il pas une injonction paradoxale ? Et que faire lorsque la cohésion groupale s’exerce au détriment de l’individuation, lorsqu’elle menace le processus de pensée et le libre arbitre ? Les sectes en représentent l’exemple extrême. « En retrouverait-on des traces dans les relations qui se créent entre certains managers et directeurs d’institutions et les équipes dont ils ont la charge ? »

Le livre éclaire ces questions portant sur les problématiques psychiques, culturelles, sociales, économiques qui traversent l’équipe à l’aide de réflexions multiples. Les auteurs des articles, psychosociologues, psychanalystes, entraîneurs et praticiens du social, dévoilent les processus de l’équipe à travers des terrains aussi variés que les institutions de soin ou l’équipe de France de handball.

Près de 6 000 postes seront supprimés au ministère des comptes publics d’ici à 2022

Cette décision est « la conséquence de la mise en œuvre » de mesures telles que le prélèvement à la source ou la suppression de petites taxes, a expliqué le ministère.

Le Monde avec AFP Publié hier à 21h55, mis à jour à 08h50

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Le ministère de l’action et des comptes publics devrait connaître une « baisse totale » de ses effectifs « d’environ 5 800 emplois sur les trois années entre 2020 et 2022 », a annoncé, mardi 3 septembre, le ministre Gérald Darmanin aux cinq organisations syndicales concernées. La décision est « la conséquence de la mise en œuvre » de « transformations d’ampleur visant à simplifier la vie des Français », telles que le prélèvement à la source ou la suppression de petites taxes, a expliqué le ministère dans un communiqué, après une réunion avec les cinq syndicats représentatifs du ministère, à savoir Solidaires, la CGT, Force ouvrière, la CFDT-CFTC et l’UNSA – CFE-CGC.

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« Nous continuerons la mobilisation »

Ce ministère, autrefois connu sous le nom de ministère du budget, constitue le cœur de Bercy, avec autorité sur la Direction du budget mais aussi sur la Direction générale des finances publiques, celle des douanes et droits indirects, des achats de l’Etat, les services du contrôle budgétaire, la lutte contre la fraude, contre la fraude financière (Tracfin), l’Agence pour l’informatique financière de l’Etat ainsi que le Centre interministériel de services informatiques relatifs aux ressources humaines. « Au total, sur la durée du quinquennat, le ministère réalisera donc une baisse de 10 000 emplois environ », précise Bercy dans son communiqué.

Selon Philippe Grasset, représentant de Force ouvrière, 1 653 suppressions d’emplois sont prévues sur la seule année 2020 : « On nous a annoncé 5 775 suppressions sur trois ans, entre 2020 et 2022, au ministère de Gérald Darmanin, dont 1 653 en 2020 », a-t-il déclaré. « C’est encore trop et nous continuerons la mobilisation », a-t-il ajouté, évoquant la grève prévue le 16 septembre, à l’appel de son syndicat, de Solidaires, de la CGT, de la CFDT et de la CFTC à la Direction générale des finances publiques (DGFip).