Delphine Batho note le fait que Hugh Bailey a été conseiller en financement des exportations au cabinet de Macron lorsqu’une aide de 70 millions d’euros a été accordée à GE.
Le parquet de Paris a ouvert début septembre une enquête préliminaire pour « prise illégale d’intérêts » visant Hugh Bailey, le directeur général de General Electric France, a-t-on appris mardi de source judiciaire, confirmant une information de L’Obs. L’enquête, effectuée par l’Office central de lutte contre les infractions financières et fiscales (OCLICCF), a été ouverte la semaine dernière.
Ex-conseiller d’Emmanuel Macron au ministère de l’économie, pour les affaires industrielles et le financement à l’export entre 2014 et 2016 – époque où le président de l république dirigé le rachat de la branche énergie d’Alstom par le géant américain General Electric en 2015 –, Hugh Bailey a été dénommé DG de GE France en avril. Il avait rejoint le groupe, en 2017, en tant que directeur des affaires publiques de GE France.
Signalement de Delphine Batho
L’ouverture de cette enquête fait suite à un demande de la députée (Génération écologie) Delphine Batho. Elle dénonçait la nomination de M. Bailey à la tête de General Electric (GE) France alors que M. Bailey avait eu à traiter des dossiers relatifs à cette entreprise quand il travaillait au ministère de l’économie.
Dans un courrier révélé par L’Obs, Mme Batho relevait qu’« une aide de 70,3 millions d’euros a été accordée à General Electric Energy Product, dont le siège est à Belfort (…) pour l’achat de quatre turbos alternateurs pour une centrale à cycle combinée à Bazian en Irak, au premier semestre 2016 ».
GE a déclaré son plan de suppression de 1044 postes en France, dont 800 à Belfort dans l’entité turbines à gaz, suscitant une vague d’indignation de la part des syndicats qui veulent que GE n’a pas respecté ses engagements envers l’Etat.
En rachetant, en 2015, le pôle énergie d’Alstom pour 9,7 milliards d’euros, le géant américain s’était engagé à conserver les emplois en France durant au moins trois ans.
Intégration sociale, indépendance, réalisation de soi ou simple occupation face à l’ennui : Thomas Schauder, professeur de philosophie, montre les multiples dimensions de ce qui est au cœur de nos vies.
Quelles sont les raisons qui nous poussent à travailler, et à choisir telle ou telle activité ? La « quête de sens » est-elle une illusion, un luxe ? Thomas Schauder, professeur de philosophie et chroniqueur pour Le MondeCampus, tente de répondre à cette question.
Notre époque est paradoxale. D’une part, le progrès technique bouleverse nos manières de travailler, au point que d’auteurs parlent d’une troisième révolution industrielle. Les machines ne se contentent plus de faire : elles pensent à notre place. Le phénomène de l’ubérisation a bouleversé l’organisation de la production, en annulant les intermédiaires. Google nous promet la voiture qui se conduira toute seule ; Amazon des livraisons par drone. D’un autre côté, un nombre croissant de personnes désirent un travail qui ait du sens.
Mais qu’est-ce que le travail ? Que peut-on en attendre ? Le travail a quatre fonctions. La première, c’est d’autoriser de gagner sa vie, de produire ou d’acheter les biens nécessaires. Il n’y a plus guère de sociétés de chasseurs-cueilleurs actuellement qui trouvent dans la nature les moyens de subsister. La plupart des peuples transforment cette nature pour la mettre au service des besoins humains – même si dans le cadre de notre économie capitaliste mondialisée, ce changement peut impliquer violence et irrespect.
« Que faites-vous dans la vie » ?
Nous en arrivons ainsi à la deuxième charge du travail : l’intégration sociale. Nous bénéficions du travail de nos ascendants et de nos contemporains, et nous œuvrons pour nos contemporains et nos descendants : le travail nous permet de payer notre dette à l’égard de la société.
De plus, le travail nous définit socialement, il indique qui nous sommes. Chaque métier a ses traditions et une image lui est accolée. D’ailleurs, quand nous rencontrons quelqu’un, la première question qu’on lui pose concerne son nom, et la deuxième son travail : « que faites-vous dans la vie » ? Au point, malheureusement, qu’on puisse se sentir stigmatisé soit parce qu’on fait un travail qui a « mauvaise réputation », soit parce qu’on n’a pas de travail.
Pour certaines personnes, celui qui ne fait rien n’est rien. Ainsi, il n’est pas seulement question de faire partie du corps social, mais d’y être situé. Autrement dit : notre travail fixe notre place dans une hiérarchie sociale. L’image a son importance : un médecin, un juge ou un chef d’entreprise sont globalement respectés, même lorsqu’ils ne gagnent pas beaucoup d’argent. Mais il est évident qu’à l’heure actuelle, où notre statut social est en grande partie déterminé par les biens qu’on possède (voiture, télévision, smartphone, etc.), le niveau de rémunération joue un rôle décisif : celui qui ne gagne rien n’est rien.
Pour certains théoriciens, ce sont là les deux seules fonctions du travail : réaliser notre nature animale (survie) et sociale. Si on s’en tient là, le travail apparaît comme un mal nécessaire. Pour les Grecs et les Latins, pour les aristocrates jusqu’à une période récente et même pour certains penseurs socialistes ou anarchistes, l’être humain digne de ce nom doit être oisif et le travail réservé à l’esclave, ou aux machines. Paul Lafargue, gendre de Karl Marx, écrit ainsi à la fin de son célèbre pamphlet Le Droit à la paresse que : « la machine est le rédempteur de l’humanité. (…) Le Dieu qui lui donnera des loisirs et la liberté. »
« Fierté » et éthique personnelle
Mais tout le monde n’est pas d’accord sur ce point et d’aucuns pensent, au contraire, que c’est le travail qui confère à l’homme sa dignité. Le « libérer du travail » serait faire son malheur. Pour eux, le travail a une troisième fonction : la réalisation, l’accomplissement de soi. C’est souvent à cette dimension que se réfèrent ceux qui réclament un travail qui ait du sens, qui ne veulent pas seulement gagner de l’argent, mais être fiers d’eux, se sentir bien dans ce qu’ils font.
Cet accomplissement, on peut le ressentir dans des tâches très différentes : manger les légumes qu’on a fait soi-même pousser, soigner ou aider les autres, contempler l’objet qu’on a fabriqué ou réparé de ses mains… Le travail n’a ainsi pas seulement une dimension morale (ne pas travailler, ce serait mal, ce serait vivre aux crochets des autres, être un assisté, etc.), mais aussi une dimension éthique : ce que je fais engage mon rapport à moi-même, aux autres et au monde.
De ce point de vue, faire un travail inutile ou nuisible peut produire une véritable souffrance (bore out, brown out…). C’est ce qui arrive également à ceux à qui on ne donne pas les moyens de faire correctement leur métier, par exemple, les personnels hospitaliers en sous-effectif chronique ou les professeurs aux classes surchargées.
Travailler pour ne pas s’ennuyer ?
Enfin, on peut proposer une quatrième fonction qui expliquerait aussi pourquoi il nous semble évident qu’il faut travailler : c’est la peur de l’ennui. Pour beaucoup de gens (et sans doute encore plus aujourd’hui où le rapport à l’attente, à l’inactivité est devenu extrêmement problématique), s’ils ne travaillaient pas, ils ne sauraient pas quoi faire de leur journée.
Blaise Pascal avait déjà mis en lumière dans ses Pensées que « tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre ». Le travail nous sert de divertissement, c’est-à-dire nous permet de ne pas penser à notre condition d’êtres humains, faibles et mortels.
Mais si le travail sert à nous fuir, à nous oublier, comment expliquer qu’on lui accorde tant d’importance ? Est-ce que les souffrances qu’il engendre, les maladies professionnelles, les soucis du quotidien et les luttes pour le conserver en valent la peine ? Avons-nous raison de consacrer tant d’énergie à travailler ? Le travail devrait-il prendre moins de place dans nos vies ? Nous tenterons de répondre à toutes ces questions la prochaine fois.
Phil’ d’Actu, l’actualité au crible de la philosophie
Plusieurs offres de reprise ou marques d’intérêt ont été mis pour la compagnie aérienne en redressement judiciaire.
Malgré sa déconfiture, Aigle Azur, la deuxième compagnie aérienne française, mis en redressement judiciaire depuis une semaine, suscite un vif attrait. Ainsi, pas moins de quatorze offres de reprise ont été mis , le 9 septembre, sur le bureau de l’administratrice judiciaire. Toutefois, cette abondance d’acquéreurs potentiels ne signifie pas que l’horizon se dégage pour Aigle Azur et ses 1 150 travailleurs.
Au contraire, la majorité des offres ne sont que de simples marques d’intérêt, quand elles ne portent pas seulement sur certains actifs de la société. Trois offres semblent sortir du lot. Elles émanent d’Air France, du Groupe Dubreuil, propriétaire de la compagnie Air Caraïbes, et du fonds d’investissement américain Cyrus Capital Partners (CCP).
L’objectif d’Air France est de mettre la main sur l’essentiel de l’activité moyen-courrier d’Aigle Azur, surtout celle, historique, vers le Portugal, l’Algérie et le Liban
Les salariés et le nouveau secrétaire d’Etat chargé des transports, Jean-Baptiste Djebbari, qui escomptaient une offre forte d’Air France, auraient été déçus. Selon nos informations, la compagnie nationale ne serait pas disposée à reprendre en l’état Aigle Azur. Elle préférerait attendre la liquidation de l’entreprise. L’objectif de la première compagnie française est de mettre la main sur l’essentiel de l’activité moyen-courrier d’Aigle Azur, surtout celle, historique, vers l’Algérie, le Portugal et le Liban. Son plan de reprise serait abondé à hauteur de 15 millions d’euros pour financer surtout un plan de sauvegarde de l’emploi.
En pratique, Air France pourrait proposer « des opportunités de recrutement aux salariés qui en feraient la demande ». D’après ce plan, la compagnie reprendrait uniquement près de la moitié des salariés d’Aigle Azur – 133 pilotes, 282 hôtesses et stewards (les personnels navigants commerciaux, PNC), ainsi que 100 personnels au sol. Toutefois, les pilotes comme les PNC devront d’abord passer la « sélection dédiée » d’entrée chez Air France.
En contrepartie de l’embauche de près de la moitié des personnels, la compagnie serait intéressée par l’intégralité des 10 000 « slots » (créneaux de décollage et d’atterrissage) détenus par Aigle Azur à Orly. Pour Air France, cette offre semble un ballon d’essai. « C’est une première offre », fait-on savoir au sein de l’entreprise. « Elle pourrait évoluer au regard de la situation d’Aigle Azur. »
La compagnie aérienne, accordé en redressement judiciaire, avait été contrainte de cesser tous ses vols le 6 septembre.
Aigle Azur a apporté, le 9 septembre, avoir reçu quatorze offres de reprise. Mais, celles-ci sont à affermir et « ne sont pas exécutables en l’état », a établi la compagnie aérienne à l’issue d’un comité d’entreprise (CE) extraordinaire entamé dans l’après-midi.
Dans le détail, ces manifestations d’intérêt concernent essentiellement des « actifs isolés », mais proposent également des « projets de reprise plus globaux », a détaillé Aigle Azur, mi en redressement judiciaire: « Ces offres de reprise de la société sont toutes à parfaire. »
« Leur sérieux industriel et leurs financements devront être confirmés dans les délais impartis », a établi la compagnie. Les membres du CE doivent se prononcer mercredi soir sur l’offre qui leur semble répondre le mieux aux intérêts de l’entreprise et de ses travailleurs.
Une offre d’Air France
« Avec les organes de la procédure, l’administrateur judiciaire va désormais tenter de mettre en état ces offres afin de parvenir à un plan de cession », d’après Aigle Azur. Le tribunal de commerce devra trancher sur l’avenir de la compagnie lors d’une audience lundi prochain.
Plus tôt lundi, Air France, qui avait été évoqué ces derniers jours comme repreneur potentiel, avait annoncé à l’Agence France-Presse avoir mi une offre, sans en donner la teneur. D’autres sociétés, comme le groupe Dubreuil, propriétaire majoritaire d’Air Caraïbes, ont aussi fait savoir avoir déposé une offre, sans en commander non plus les détails.
En redressement judiciaire et ayant dû cesser tous ses vols vendredi 6 septembre, Aigle Azur est dans une telle impasse financière qu’elle ne peut ni dédommager financièrement ses clients ni même assurer la réinsertion des voyageurs dont le vol de retour a été aboli. Avec ses onze avions, la compagnie a transporté 1,88 million de passagers en 2018.
Les syndicats dénoncent des primes « écœurantes et aberrantes », alors que le groupe d’habillement connaît une telle crise qu’il est passé fin août aux mains de ses créanciers.
La pilule a du mal à passer parmi les 10 000 salariés de Vivarte. Alors que le groupe d’habillement, dans l’impossibilité de rembourser sa dette de 300 millions d’euros, passe aux mains de ses créanciers, Le Parisien révèle, lundi 9 septembre, que des hauts cadres ont touché près d’un million d’euros de primes exceptionnelles en 2017 et en 2018, auxquelles se sont ajoutées des primes sur objectif de plus de deux millions d’euros.
« Dans le détail, pour 2017, une enveloppe de 523 826 euros de primes exceptionnelles a été répartie entre 31 personnes [de la filiale Vivarte Services, parmi lesquels des directeurs financiers, juridiques, DRH]. L’une [d’elles] a touché 150 000 euros,avance le quotidien. En 2018, c’est 425 879 euros que se sont partagés quatorze personnes [dont 100 000 euros pour l’une d’elles]. »
Des primes qui ont scandalisé les syndicats du groupe, propriétaire des enseignes La Halle et Caroll. « C’est amoral, écœurant et aberrant, même si ce n’est pas illégal », a réagi Jean-Louis Alfred, représentant CFDT. « En trois ans de direction de Patrick Puy, le nombre de filiales est passé de 19 à 3 fin décembre avec la cession de Cosmoparis, le groupe est aux mains des créanciers et les magasins La Halle sont en train de mourir faute de stratégie », ajoute-t-il.
Lundi matin sur Franceinfo, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, avait jugé le versement des primes « inacceptable, hors du temps ». « On est chez les dingues », soulignait-il. « C’est proprement scandaleux, a aussi dénoncé Karim Cheboub, secrétaire adjoint CGT au comité de groupe. On distribue de l’argent au moment où des filiales sont cédées et où des salariés perdent leur emploi. » Claire Vigouroux, coordinatrice groupe pour FO souligne qu’« au même moment on nous annonce qu’il n’y aura que 15 000 euros pour la formation professionnelle ».
Eviter le « débauchage »
De son côté, Vivarte reconnaît comprendre que « le montant des primes versées évoquées dans l’article du Parisien puisse surprendre » mais explique que ces primes récompensent « le talent et l’engagement dont nos cadres ont fait preuve pour mener à bien l’important plan de cessions » mis en œuvre depuis 2017. « Cette prime exceptionnelle correspond à un choix défensif de l’entreprise pour protéger certaines compétences indispensables et éviter qu’elles soient débauchées par des concurrents », s’était également justifié en mars Xavier Guéry, le directeur des ressources humaines, rapporte Le Parisien.
Selon le groupe, les primes exceptionnelles représentent 700 000 euros brut pour les années 2017 et 2018 et non un million (et comprennent des mesures d’accompagnement de plan social chez Vivarte Services). « Ce qui est trois fois moins que les primes annuelles sur objectif (2,1 millions d’euros), sur la même période, que nous versons à l’ensemble des salariés de Vivarte Services (100 personnes en 2018) de façon contractuelle », ajoute le groupe.
En trois ans, le groupe a connu une telle crise qu’il a été contraint de céder la plupart de ses enseignes, dont Chevignon, André, Naf Naf, Kookaï, Pataugas. Et la conjoncture n’est pas pour aider : en France, les ventes d’habillement ont reculé de 2,9 % sur les quatre premiers mois de 2019. En avril, leur chute a flirté avec les 8 % par rapport à avril 2018.
Agnès Buzyn, a détaillé, lundi, une série de mesures sur trois ans. Mais sans lits ni effectifs supplémentaires.
Qu’il paraît loin ce mois d’avril où la ministre de la santé, Agnès Buzyn, assurait sur le plateau de Public Sénat que la grève dans les urgences de plusieurs hôpitaux parisiens n’était pas due aux conditions de travail ! Cinq mois plus tard, et 249 sites en grève à travers tout le pays, les problèmes d’agressions et d’insécurité, d’abord mis en avant par la ministre, ont été relégués au second plan. Pour répondre à l’augmentation continue du nombre de patients, multiplié par deux en vingt ans, et supérieur à 21 millions en 2017, l’heure est à la « refondation » et au « repositionnement ».
Le plan présenté lundi 9 septembre par Mme Buzyn, élaboré en toute hâte sur la base d’une « mission-flash » menée pendant l’été par le député (LRM) de Charente Thomas Mesnier et le patron du SAMU de Paris Pierre Carli, ne contient aucune annonce choc de réouverture massive de lits ou de nouvelle revalorisation salariale, comme le réclament les infirmiers et les aides-soignants en grève. « Cette absence totale de revalorisation des soignants, c’est le gros point qui me choque », assurait lundi soir Hugo Huon, le président du collectif Inter-Urgences, la structure qui fédère les paramédicaux grévistes, à la veille de l’assemblée générale du mouvement à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis).
Les douze mesures du plan, doté de 754 millions d’euros sur la période 2019-2022, dont 150 millions d’euros pour l’année 2020, sont toutes destinées à « lever la pression » sur les services d’urgences. Elles viennent compléter les premières mesures prises avant l’été pour un montant de 70 millions d’euros (dont 50 millions sont destinés à financer une prime de risque mensuelle de 100 euros net pour les paramédicaux des urgences, et que toucheront désormais également les assistants de régulation médicale). Les moyens supplémentaires annoncés lundi devraient concerner à hauteur de 630 millions d’euros « des renforts, en ville comme à l’hôpital, de médecins et soignants », sans aucune traduction précise en termes d’effectifs.
Même si l’exécutif est resté particulièrement silencieux sur ce point, ces crédits supplémentaires pourraient être obtenus en économisant sur d’autres postes, de manière à ne pas toucher à l’objectif national de dépenses d’assurance-maladie (Ondam), l’enveloppe fermée qui contraint les dépenses de santé. « Si certaines mesures méritent discussions, il s’agit de redéploiement budgétaire, ce qui est contradictoire avec les annonces », déplore Christophe Prudhomme, membre de la CGT et porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF), en réclamant un Ondam à 5 %, soit 4 milliards d’euros supplémentaires dans le budget de la santé.
Répondre à toute heure à la demande
C’est la mesure qui frappera sans doute le plus les esprits : un service d’accès aux soins (SAS) devrait être mis en place d’ici à l’été. Objectif de ce « service distant universel », accessible par téléphone ou par Internet : « Répondre à toute heure à la demande de soins des Français. » Il devra notamment permettre d’obtenir vingt-quatre heures sur vingt-quatre un conseil médical et paramédical, de prendre rendez-vous pour une consultation avec un médecin généraliste dans les vingt-quatre heures, de procéder à une téléconsultation, d’être orienté vers un service d’urgences ou de recevoir une ambulance.
Si le coût du dispositif est déjà connu (340 millions d’euros sur trois ans), ses modalités ne seront précisées qu’en novembre. Il s’agira notamment de trancher si le SAS constitue le numéro unique de régulation du système de soins ou s’il cohabite avec le 15, le numéro des urgences. « Il ne faut pas se focaliser sur cette histoire de numéro », assure François Braun, le président de SAMU-urgences de France. Partisan d’un numéro unique, il se dit déjà à ce stade satisfait de l’officialisation d’une plate-forme de régulation. « Le numéro unique, ça s’adresse à des personnes CSP+ qui sont dans une démarche citoyenne d’appeler pour ne pas engorger les urgences », tempère Hugo Huon. Autre interrogation : combien faudra-t-il de médecins libéraux pour faire fonctionner un tel système ? Où les trouvera-t-on ?
Cinquante maisons médicales de garde accueillant des médecins libéraux seront par ailleurs financées d’ici à la fin de l’année « à proximité directe » de tous les services d’urgences totalisant plus de 50 000 passages par an. Le ministère a expliqué vouloir développer une offre de soins libérale présentant les mêmes attraits que les urgences. D’ici à la fin de l’année, tous les médecins de garde devraient ainsi disposer de terminaux permettant de pratiquer le tiers payant sur la part « sécu ». « Nous travaillons pour que ce tiers payant s’élargisse en 2020 à la part complémentaire santé », a expliqué Mme Buzyn lundi. Des « examens de biologie médicale simples et automatisés » seront possibles dans des cabinets libéraux, avec des résultats accessibles dans des délais courts.
« Lutter contre les dérives de l’intérim médical »
Le plan présenté lundi prévoit par ailleurs de « lutter plus efficacement contre les dérives de l’intérim médical », en obligeant notamment les médecins intérimaires à fournir lors du recrutement une attestation sur l’honneur certifiant qu’ils ne contreviennent pas aux règles sur le cumul d’emplois publics. « On aurait aimé des décisions un peu plus dures sur cet intérim qui entraîne l’asphyxie de nos services », fait valoir François Braun, à SAMU-urgences de France.
Autre volet du plan : une meilleure organisation des hôpitaux. Ceux-ci devront contractualiser avec les Ehpad afin de mettre en place des filières d’accès direct des personnes âgées, afin de ne pas faire des urgences la porte d’entrée – souvent éprouvante – de l’hôpital. Les établissements devront par ailleurs tous optimiser la gestion de leurs lits d’hospitalisation, par le biais de l’embauche de gestionnaires de lits et la mise en place de logiciels de prédiction des besoins. Sur la question des lits, cruciale pour les grévistes, Mme Buzyn a assuré lundi qu’il n’y avait « aucun dogmatisme à avoir » : « Je veux optimiser les lits vides existant et en recréer si besoin », a-t-elle déclaré.
Pour ne pas pénaliser les hôpitaux qui enregistreraient une baisse des passages aux urgences, notamment du fait d’une meilleure prise en charge par la médecine de ville, le financement des urgences sera revu, par l’intermédiaire du versement d’une « dotation populationnelle ». Autrement dit, les services d’urgences ne seront plus financés exclusivement à l’activité mais recevront une « enveloppe forfaitaire » dépendant de l’importance de la population couverte et de ses caractéristiques socio-économiques, ainsi que de la « densité médicale libérale dans leur territoire ».
Cinq chercheurs contestent l’idée que les aidants d’un proche dépendant puissent faire le libre choix de se retirer du marché du travail.
Comment entendre la parole et les besoins des appuis et aidants de personnes en situation de handicap ou de personnes âgées en perte d’autonomie ? La question se pose de nos jours alors qu’une changement des dispositifs publics de soutien à l’autonomie est proclamée. Dans notre laboratoire (LISE-CNRS, CNAM, Paris), nous avons achevé ce printemps une recherche sur les proches aidants et avons, entre autres, procédé à l’analyse de près de soixante entretiens approfondis auprès de personnes fortement investies dans l’aide à domicile d’un ou d’une proche.
Nombre d’entre eux trouvent une satisfaction à aider concrètement au bien-être d’un proche entravé dans son corps et sa participation au monde. Cette interprétation rejoint celle mise en avant par Nancy Fraser dans son texte « After the family wage » dans la revue Political Theory (vol. 22, no 4, novembre 1994). La philosophe américaine y défendait le développement d’arrangements politiques et sociaux admettant à tout le monde de faire favoriser le choix d’une activité pleine de sens auprès d’un proche vulnérable, plutôt que de primer pour tous et tout le temps la présence sur le marché du travail.
3,90 ou 5,84 euros de l’heure
Mais une telle inversion des valeurs ne se décrète pas, et donner à penser que les conditions d’un vrai choix sont associés est fallacieux. Plus encore, évoquer sempiternellement le chiffre de 8,3 millions d’aidants en France ou prétendre que 90 % d’entre eux réalisent ce choix librement aider plus à brouiller la réalité de l’aide qu’à sensibiliser l’opinion. Surtout quand ils cohabitent avec la personne aidée, sont en âge de travailler, de santé fragile, ou que leurs liens sociaux ont été emportés par le huis clos de l’aide en continu, les aidants sont pris dans des dilemmes profonds.
Début octobre, les urgences de l’hôpital de Mulhouse n’admet plus que sept médecins, contre vingt-six il y a encore quelques mois. Une difficulté qui met à mal l’ensemble de l’hôpital.
Les urgences de l’hôpital Emile-Muller de Mulhouse (Haut-Rhin) fait face à une crise d’embauche sans précédent. En grève depuis le 25 avril, il a souffert d’une cascade de démissions chez ses médecins urgentistes. Et leur trouver des remplaçants est une gageure. Résultat : ils ne sont Dès lors plus qu’une dizaine, dans un secteur où vivent 450 000 habitants.
« Il y a encore trois à quatre mois, le service était composé de 26 médecins urgentistes. Le 1er octobre, nous ne serons plus que sept », déclare Sami Kacem, doyen de l’équipe. Si les urgences vitales sont tout le temps assurées, un seul des deux véhicules de service mobile est opérationnel et les temps « texturants » des urgentistes, accordé à l’organisation du service, à la formation ou à l’analyse des protocoles, sont relégués aux oubliettes. Un mode de fonctionnement dégradé qui met en péril l’ensemble du groupe hospitalier Mulhouse Sud-Alsace, composé au total de neuf établissements, dont quatre hébergent des services d’urgences. Le 7 et le 8 septembre, les urgences d’Altkirch, situées à 20 kilomètres de Mulhouse, ont ainsi dû être temporairement clôturées, faute de médecins urgentistes, et le public invité à composer le 15.
Les conditions de travail expliquent pour beaucoup cette hémorragie. Depuis des mois, les médecins associent des semaines de cinquante-six, voire soixante-douze heures. « Selon les préconisations de la Société française de médecine d’urgence, nous devrions être 34 médecins urgentistes. Dans les conditions actuelles, la pression des horaires est trop forte. A la fin de chaque garde, on ne sait plus comment on s’appelle », déclare Sami Kacem. Alors les médecins démissionnent, pour avoir plus de temps libre, voir grandir leurs enfants, ou tout simplement voir ailleurs.
Poste usant
Ailleurs, ça peut être notamment la Suisse toute proche, où les rétributions sont bien plus intéressantes, ou encore le travail intérimaire. « Comment voulez-vous intéresser des jeunes aux fonctions hospitalières quand une garde de vingt-quatre heures est payée 2 400 euros à un intérimaire, contre moins de 300 euros pour un cadre hospitalier ? », se demande le médecin. Après trente-cinq ans de carrière, ce dernier gagne 7 500 euros brut, auxquels s’ajoutent une indemnité multisite ainsi qu’une prime d’ancienneté. « Dans le privé, ce serait quatre à cinq fois plus », mentionne-t-il.
la banque française BNP Paribas veut ouvrir ses agences plus tard le soir, jusqu’à 19 heures, alors que les enseignes baissent actuellement le rideau avant la sortie des bureaux. Depuis 2011, le nombre de succursales en France ne cesse de baisser.
Infographie Le Monde
« La banque est le dernier commerce de proximité aussi peu adapté à la vie des urbains. » C’est avec cette phrase qu’une agence de communication choisie par LCL avait annoncé, en octobre 2018, l’ouverture jusqu’à 20 heures de plusieurs agences de l’ex-Crédit lyonnais, à Paris et en région. Le test a duré trois mois. « Une expérience unique », dans la mesure où « dans les villes, la majorité des commerces de proximité ferment de plus en plus tardivement, alors que les banques ont en moyenne une amplitude horaire de 9 heures à 17 heures, avec une interruption en milieu de journée », avait alors indiqué l’établissement, dans un communiqué.
Tandis que LCL fait actuellement savoir qu’elle est encore en train de tirer le bilan de cette expérimentation, d’autres banques veulent, elles aussi, accommoder leurs horaires d’ouverture. BNP Paribas a ainsi lancé une négociation avec les représentants syndicaux de son réseau à Paris, afin de pouvoir ouvrir ses succursales jusqu’à 19 heures. L’objectif est « d’augmenter le business et de développer le parc de clients », affirme la CFDT des agences parisiennes dans un communiqué publié sur le site du syndicat. « Les agences qui proposeraient une nocturne ne seraient plus ouvertes le samedi après-midi, un créneau où l’affluence reste faible, avec peu d’activité à la clé », déclare un syndicaliste.
« Le contexte économique est compliqué aujourd’hui pour les banques, avec les taux très bas. Il faut donc chercher à s’adapter aux clients et à se différencier des autres établissements, ajoute un élu parisien du SNB-CFE-CGC, première organisation syndicale chez BNP Paribas. Mais pas à n’importe quel prix. Nous défendons aussi la qualité de vie au travail, car beaucoup de conseillers clientèle n’habitent pas à Paris. »
« Réflexion stratégique »
Les accomplir devraient aboutir à l’automne, mais si la direction de la banque n’obtenait pas l’aval des organisations syndicales, elle pourrait dénoncer le protocole d’accord sur les horaires variables. « Une réflexion stratégique est ouverte sur les horaires d’ouverture », mais « aucune décision n’a été prise », a réagi un porte-parole de BNP Paribas. Le Crédit mutuel conduit également « des expérimentations », admet un porte-parole du groupe. Quelques agences testent surtout depuis peu l’ouverture de leurs guichets jusqu’à 19 heures, deux fois par semaine.
Les deux prévenus comparaissent pour traite d’être humain, travail caché, emploi d’un étranger sans titre et aide au séjour irrégulier.
Un ancien ministre burundais et diplomate à l’Unesco est jugé le 9 septembre aux côtés de sa femme à Nanterre. Le couple est présumé d’avoir exploité durant dix ans un Burundais qui travaillait dans leur maison des Hauts-de-Seine.
Ce sont des ouvriers intervenant dans la maison de Gabriel Mpozagara à Ville-d’Avray (Hauts-de-Seine) qui ont signalé, en juillet 2018, la situation de cet homme. Actuellement âgé de 39 ans, ce dernier est arrivé de Bujumbura en 2008, originellement pour une période de trois mois. Selon les parties civiles, il a alors dû travailler dix-neuf heures par jour, sept jours sur sept, s’occupant du ménage, du jardin, de la cuisine, de la lessive, ainsi que des soins d’un des enfants du couple, un adulte souffrant de handicap.
L’homme était « rabaissé » et« insulté », dormait dans la cave sans conditions d’hygiène basiques, son passeport lui ayant été enlevé, décrivent les parties civiles, qui ajoutent qu’il devait recevoir environ 50 euros de rétribution par mois – une somme qui n’a, de plus, pas été versée en intégralité. Les deux prévenus, qui contestent toute infraction, comparaissent pour « traite d’être humain », « travail dissimulé », « emploi d’un étranger sans titre » et « aide au séjour irrégulier ».
Déjà condamnés dans un dossier similaire
Le diplomate « a été meurtri et très peiné » de « cette dénonciation qu’il considère comme calomnieuse et nous ferons en sorte de faire éclater la vérité », a ajouté Me Dominique Naveau-Duschesne, son avocate. « Les pièces du dossier montrent les contradictions qu’il y a entre (les) déclarations (du plaignant) et la réalité », a-t-elle assuré, ajoutant qu’il s’agissait d’un « ami de la famille, qui était traité comme un membre de la famille ».
Le couple avait été condamné en 2007 à Nanterre dans un dossier similaire, puis ils avaient été relaxés en appel. A l’époque, ils avaient été accusés « d’avoir maintenu dans des conditions de travail et d’hébergement contraires à la dignité humaine » deux jeunes parentes, déclare dans un communiqué le Comité contre l’esclavage moderne (CCEM), partie civile au procès de lundi. Les deux sœurs, qui étaient orphelines, ont poursuivi la procédure jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), qui a condamné la France en octobre 2012 pour avoir failli dans sa lutte contre le travail forcé.