« Depuis des années que l’on détient l’usine à bout de bras »
Le leader mondial des arts de la table, 5 500 salariés en France, menacé de redressement judiciaire.

C’est un dossier industriel très sensible qu’Emmanuel Macron et Bruno Le Maire savent par cœur. Et pour cause : le premier s’était lutté, lorsqu’il était ministre de l’économie, pour récupérer un repreneur au verrier Arc International ; le second s’était rendu au siège du groupe de 10 000 salariés, à Arques (Pas-de-Calais), quelques heures après avoir été appelé à Bercy, en mai 2017, afin d’annoncer l’investissement de 35 millions d’euros par son propriétaire et des fonds souverains russe (RDIF) et français (BPI).
Depuis 2015, 400 millions d’euros de nouvelles dettes ont été contractés, après l’effacement d’une ardoise de 350 millions d’euros
Le leader mondial des arts de la table se voit une nouvelle fois en pénurie. Ses marques (Arcopal, Arcoroc, Luminarc, etc.) ont certes été relancées, avec des ventes reparties à la hausse et un chiffre d’affaires stabilisé autour de 900 millions d’euros. Mais les résultats aisés ne suffisent pas à couvrir ses coûts. La société brûle toujours trop de cash. Depuis 2015, 400 millions d’euros de nouvelles dettes ont été tendus, après l’abolition d’une ardoise de 350 millions d’euros.
La cristallerie, dont la famille Durand dispose encore 10 % du capital, reprise par le fonds de placement américain Peaked Hill Partners en 2015, est d’ailleurs de retour au comité interministériel au réaménagement industriel. Son management cherche de nouveaux fonds. Officiellement, il s’agit de trouver 120 millions pour lancer la deuxième phase du plan de modernisation de l’entreprise, dont la principale usine – qui emploie 5 500 personnes – est installée à Arques.
« Nous avons structuré un grand nombre de réunions, et cela semble bien se passer », assure une source proche du dossier. « La situation devrait se débloquer sans nouveaux financeurs. Une issue favorable est attendue. L’entreprsise n’est pas en péril », certifie une autre source. « Il n’y a pas de problème de viabilité de l’entreprise, ajoute une troisième source. Cependant, il faudra peut-être en passer par une phase transitoire, un peu inquiétante pour les salariés, de liquidation afin de débloquer la situation et faire évoluer l’actionnariat du groupe… »
Problèmes de paierie
« L’Etat, la région Hauts-de-France et la communauté d’agglomération de Saint-Omer ont autorisé de faire des avances », garantit Xavier Bertrand, le président des Hauts-de-France. Bercy, qui a effacé une réunion technique sur le sujet mercredi matin, ne désire pas faire de commentaires.
Jusqu’à maintenant, costume, cravate, tailleur et souliers briqués étaient de rigueur pour les salariés de l’institution, qui fête cette année son 150e anniversaire. Un premier effort à cette convention avait seulement permis, dès 2017, aux ingénieurs des divisions technologiques et numériques du groupe de s’habiller de façon plus détendue.
Aussitôt, tous les salariés pourront arranger « un code vestimentaire flexible ». La note interne, dévoilée par l’agence Reuters, ne dresse pas la liste des vêtements qui seront qualifiés dans les bureaux de la banque.
« Caractère changeant des lieux de travail »
« Nous savons tous ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas sur le lieu de travail », souligne le mémo, précisant tout de même que « bien sûr, une tenue décontractée ne convient ni pour tous les jours ni pour tous les types d’interactions. Nous vous faisons confiance pour faire preuve de discernement en la matière. »
Pourquoi l’illustre maison remise-t-elle l’uniforme du banquier et de la banquière d’affaires au placard ? La nouvelle administration de l’établissement évoque le « caractère changeant des lieux de travail dans leur ensemble, allant vers un environnement plus informel ».
L’entreprise, qui se décrit depuis quelques années comme une « Tech company », doit en effet octroyer des gages de modernité. Il s’agit particulièrement d’attirer les meilleures recrues, lourdement aspirées par les géants de l’Internet de la Silicon Valley (Californie), où règne le look jean tee-shirt, symbolisé par le patron de Facebook, Mark Zuckerberg.
La banque était l’une des dernières maisons à conserver la tradition du complet sur mesure en toutes circonstances. JPMorgan Chase autorise depuis trois ans ses employés à changer le costume pour le polo, en posant toutefois quelques limites : pas de tongs ni de sweats à capuche au bureau. Pour en parvenir là, il aura fallu que Goldman Sachs se dote d’un nouveau patron, David Solomon, banquier et… DJ la nuit – sous le nom de « D.J. D-Sol ».