{"id":4824,"date":"2019-06-04T19:28:47","date_gmt":"2019-06-04T17:28:47","guid":{"rendered":"https:\/\/www.lemonde.fr\/tiny\/5471453\/"},"modified":"2019-06-11T08:02:05","modified_gmt":"2019-06-11T06:02:05","slug":"ils-font-tout-pour-nous-degouter-et-pour-quon-abandonne","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/jeunediplome.net\/ils-font-tout-pour-nous-degouter-et-pour-quon-abandonne\/","title":{"rendered":"\u00ab Ils font tout pour nous d\u00e9gouter et pour qu\u2019on abandonne \u00bb"},"content":{"rendered":"<figure><picture class=\"article__media\"><source srcset=\"https:\/\/img.lemde.fr\/2019\/06\/04\/0\/0\/5539\/3655\/688\/0\/60\/0\/985d091_5981329-01-06.jpg\" media=\"(min-width: 992px)\" \/><source srcset=\"https:\/\/img.lemde.fr\/2019\/06\/04\/0\/0\/5539\/3655\/688\/0\/60\/0\/985d091_5981329-01-06.jpg\" media=\"(min-width: 576px)\" \/><img src=\"https:\/\/img.lemde.fr\/2019\/06\/04\/0\/0\/5539\/3655\/688\/0\/60\/0\/985d091_5981329-01-06.jpg\" alt=\"Manifestation des cheminots, le 4 juin, \u00e0 Paris.\" \/><\/picture><noscript> <img src=\"https:\/\/img.lemde.fr\/2019\/06\/04\/0\/0\/5539\/3655\/688\/0\/60\/0\/985d091_5981329-01-06.jpg\"\/><\/noscript><figcaption class=\"article__legend\" aria-hidden=\"\u201ctrue\u201c\">Manifestation des cheminots, le 4 juin, \u00e0 Paris. GEOFFROY VAN DER HASSELT \/ AFP<\/figcaption><\/figure>\n<section class=\"article__reactions\"><em><strong>\u00ab Un an apr\u00e8s, on mesure le bilan. Partout, on supprime des postes. Des cheminots se suicident parce qu\u2019ils n\u2019ont pas de perspective d\u2019avenir. Il est temps de relever la t\u00eate ! \u00bb, d\u00e9clare un d\u00e9l\u00e9gu\u00e9 syndical sur la sc\u00e8ne \u00e9tablie au d\u00e9but du cort\u00e8ge.<\/strong><\/em><\/p>\n<p>Des milliers de cheminots ont manifest\u00e9, mardi 4 juin, \u00e0 Paris, contre la r\u00e9forme ferroviaire et la d\u00e9gradation du climat social dans l\u2019entreprise. \u00ab Stop \u00e0 la casse de la SNCF \u00bb, \u00ab La SNCF n\u2019est pas \u00e0 vendre \u00bb, annon\u00e7aient les banderoles dans la foule, h\u00e9riss\u00e9e de centaines de drapeaux syndicaux.<\/p>\n<p>Cette expression nationale, organis\u00e9e \u00e0 l\u2019appel des quatre syndicats repr\u00e9sentatifs de la SNCF (CGT-Cheminots, UNSA-Ferroviaire, SUD-Rail et CFDT-Cheminots), est la premi\u00e8re depuis le d\u00e9cret du \u00ab nouveau pacte ferroviaire \u00bb, fin juin 2018. La loi planifie l\u2019entr\u00e9e \u00e0 la concurrence du transport national ferroviaire de voyageurs et instaure l\u2019arr\u00eat des recrutes au statut de cheminot \u00e0 partir du 1er janvier 2020, date \u00e0 laquelle la SNCF sera r\u00e9form\u00e9e en plusieurs soci\u00e9t\u00e9s anonymes.<\/p>\n<p>A la station de Lille-Flandres, \u00ab onze personnes sont actuellement en arr\u00eat maladie, dont six en accident de travail, sur vingt-cinq salari\u00e9s \u00bb<\/p>\n<p>La vision effraye les manifestants, qui redoutent que leurs conditions de travail, d\u00e9j\u00e0 \u00ab \u00e0 flux tendu \u00bb, empirent davantage. La situation est essentiellement difficile aux guichets, constamment supprim\u00e9s au profit de bornes automatiques. Les files d\u2019attente s\u2019allongent et le m\u00e9contentement des clients s\u2019accro\u00eet.<\/p>\n<p>A la gare de Lille-Flandres, \u00ab onze personnes sont actuellement en arr\u00eat maladie, dont six en accident de travail, sur vingt-cinq salari\u00e9s \u00bb, continue Sandrine, 39 ans, devenue assistante responsable \u00e0 la boutique SNCF de Lille-Europe apr\u00e8s la cession de son poste dans une autre gare, en d\u00e9cembre 2018. L\u2019an pass\u00e9, face \u00e0 l\u2019affluence et au sentiment de ne pas \u00eatre \u00e9cout\u00e9e par ses sup\u00e9rieurs, elle a \u00ab p\u00e9t\u00e9 un c\u00e2ble \u00bb, mentionne-t-elle : \u00ab Je suis sortie et j\u2019ai donn\u00e9 un coup de poing dans un poteau. C\u2019\u00e9tait \u00e7a ou mon chef. \u00bb<\/p>\n<p>\u00ab Je ne dors plus la nuit \u00bb<\/p>\n<p>\u00ab Il n\u2019y a pas un jour o\u00f9 on ne se fait pas engueuler, d\u00e9clare sa coll\u00e8gue Sylvie. Les clients, qui attendent jusqu\u2019\u00e0 une heure et demie pour acheter un simple billet, nous disent qu\u2019on est des \u201cbons \u00e0 rien\u201d, qu\u2019on est \u201cdans une planque\u201d, ou nous lancent \u201cvivement la concurrence !\u201d C\u2019est pas possible de travailler comme \u00e7a. On a demand\u00e9 du personnel en plus mais la direction nous dit qu\u2019elle n\u2019a pas les moyens. Elle r\u00e9p\u00e8te qu\u2019il faut qu\u2019on soit meilleur et moins cher que la concurrence, qu\u2019ils n\u2019y peuvent rien, que c\u2019est comme \u00e7a. \u00bb<\/p>\n<p>Epuis\u00e9e par la pression croissante, la trentenaire, en poste \u00e0 la SNCF depuis 2005, est en arr\u00eat de travail depuis une semaine et sous traitement anxiolytique. \u00ab Je ne dors plus, la nuit, j\u2019ai des angoisses, confie-t-elle. Rien que l\u2019id\u00e9e de retourner au guichet me donne la boule au ventre. \u00bb Elle a averti ses chefs : \u00ab S\u2019ils me proposent une bonne enveloppe, je pars. De toute fa\u00e7on, ils font tout pour nous d\u00e9go\u00fbter et pour qu\u2019on s\u2019en aille. \u00bb<\/p>\n<p>\u00ab M\u00eame les m\u00e9decins de la SNCF nous demandent de d\u00e9poser des droits d\u2019alerte<\/p>\n<p>Le malaise est si difficile, selon les envoy\u00e9s syndicaux, que \u00ab m\u00eame les m\u00e9decins de la SNCF nous sollicitent de d\u00e9poser des droits d\u2019alerte pour signaler un danger grave et imminent, affirme David Lasnier, secr\u00e9taire g\u00e9n\u00e9ral CGT des cheminots de Vierzon (Cher). Les gens sont en pleurs, il y a un surplus de travail et une souffrance sociale \u00bb.Par exemple, \u00e0 la faveur du Fret, \u00ab une vingtaine de droits d\u2019alerte ont \u00e9t\u00e9 d\u00e9pos\u00e9s depuis janvier sur toute la France, contre environ trois par an habituellement \u00bb, d\u00e9clare-t-il.<\/p>\n<p>Philippe Renaud, 52 ans, dont trente pass\u00e9s \u00e0 la SNCF, fait le parall\u00e8le avec le film de Ken Loach, The Navigators, sur la d\u00e9nationalisation du chemin de fer britannique : \u00ab C\u2019est exactement ce qu\u2019on vit : un service public livr\u00e9 en p\u00e2ture au plus offrant, de la sous-traitance de sous-traitance, o\u00f9 tout est pay\u00e9 pour gagner un peu de fric. \u00bb Froiss\u00e9, il regrette \u00ab la disparition de l\u2019humain du service public \u00bb et redoute que, apr\u00e8s la r\u00e9forme, \u00ab les vieux soient mis au placard ou pouss\u00e9s vers la sortie \u00bb.<\/p>\n<p>\u00ab Ils sont en train de faire un plan social gigantesque \u00bb, se f\u00e2che son coll\u00e8gue Arnaud Jamis. Lui-m\u00eame verra son poste effac\u00e9 en 2020 avec la fermeture du guichet de la gare de Saint-Germain-en-Laye (Yvelines). \u00ab Actuellement, on est quatre pour faire le boulot de dix. \u00c7a ne d\u00e9semplit pas. Mais l\u2019ann\u00e9e prochaine je ne sais pas o\u00f9 je serai, ni ce que je ferai \u00bb, d\u00e9clare-t-il, d\u00e9sempar\u00e9.<\/p>\n<p>\u00ab Restructuration permanente \u00bb<\/p>\n<p>L\u2019anxi\u00e9t\u00e9 jointe \u00e0 l\u2019avenir de la SNCF p\u00e8se sur le moral des cheminots. Sandrine, contr\u00f4leuse TGV de 47 ans et travailleuse depuis vingt-huit ans dans l\u2019entreprise, voit \u00e0 contrec\u0153ur de se reconvertir. \u00ab J\u2019adore mon travail, mais je veux me former, si jamais on me demande de partir \u00e0 50 ans\u2026 Je n\u2019ai que le bac, donc je n\u2019ai pas le choix. \u00bb Elle a d\u00e9j\u00e0 pr\u00e9venu sa fille de 7 ans au cas o\u00f9 elle serait bient\u00f4t destitu\u00e9e : \u00ab Je lui ai dit : \u201cTout ce que tu as aujourd\u2019hui, tu ne l\u2019auras peut-\u00eatre pas demain.\u201d Je ne sais pas si c\u2019est le mieux, mais je pr\u00e9f\u00e8re la pr\u00e9parer. \u00bb<\/p>\n<p>Amplement font part de leur trouble devant la \u00ab restructuration permanente \u00bb. \u00ab Des coll\u00e8gues en ont v\u00e9cu trois, parfois plus. La digitalisation fait qu\u2019il y a plein de nouveaux m\u00e9tiers, sur lesquels on doit basculer. \u00c7a g\u00e9n\u00e8re de la souffrance \u00bb, d\u00e9plore Anthony, travailleur depuis 1990 et employ\u00e9 au Fret.<\/p>\n<p>\u00ab On a l\u2019impression de vivre la m\u00eame chose qu\u2019\u00e0 France T\u00e9l\u00e9com \u00bb<\/p>\n<p>A ses c\u00f4t\u00e9s, Denis, ancien contr\u00f4leur de 57 ans, s\u2019agace : \u00ab La SNCF vise la rentabilit\u00e9, mais o\u00f9 est le service public ? Et avec la r\u00e9forme ce sera encore pire ! Comment \u00e7a va se passer quand une entreprise priv\u00e9e va reprendre tout \u00e7a ? Quel statut sera propos\u00e9 aux cheminots ? Que deviendront ceux qui ont une maison, une famille, et qui seront pouss\u00e9s \u00e0 la mobilit\u00e9 ? On a l\u2019impression de vivre la m\u00eame chose qu\u2019\u00e0 France T\u00e9l\u00e9com [dont le plan de restructuration est soup\u00e7onn\u00e9 d\u2019\u00eatre \u00e0 l\u2019origine de suicides]. La direction passe en force au nom de l\u2019ouverture \u00e0 la concurrence. \u00bb<\/p>\n<p>Rien qu\u2019en mai, \u00ab trois cheminots se sont suicid\u00e9s en France, ajoute-t-il, mais la SNCF ne les reconna\u00eet \u00e9videmment pas comme tels \u00bb. Suivant SUD-Rail, beaucoup de suicides ont eu lieu depuis le d\u00e9but de l\u2019ann\u00e9e, en lien avec le r\u00e9\u00e9chelonnement. De leur c\u00f4t\u00e9, les ressources humaines de la SNCF se bornent \u00e0 indiquer que huit suicides depuis 2013 ont \u00e9t\u00e9 class\u00e9s par la Commission sp\u00e9ciale des accidents du travail et des maladies professionnelles (CSAT) comme li\u00e9s au travail, avec un dominant de deux par an et aucun en 2018.<\/p>\n<\/section>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"<p>Manifestation des cheminots, le 4 juin, \u00e0 Paris. GEOFFROY VAN DER HASSELT \/ AFP \u00ab Un an apr\u00e8s, on mesure le bilan. Partout, on supprime des postes. Des cheminots se suicident parce qu\u2019ils n\u2019ont pas de perspective d\u2019avenir. Il est temps de relever la t\u00eate ! \u00bb, d\u00e9clare un d\u00e9l\u00e9gu\u00e9 syndical sur la sc\u00e8ne \u00e9tablie<\/p><\/div>\n<div class=\"blog-btn\"><a href=\"https:\/\/jeunediplome.net\/ils-font-tout-pour-nous-degouter-et-pour-quon-abandonne\/\" class=\"home-blog-btn\">Lire la suite<\/a><\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":4825,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","sticky":false,"template":"","format":"standard","meta":[],"categories":[5],"tags":[],"_links":{"self":[{"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/4824"}],"collection":[{"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/posts"}],"about":[{"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/types\/post"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/users\/1"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/comments?post=4824"}],"version-history":[{"count":0,"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/4824\/revisions"}],"wp:featuredmedia":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/media\/4825"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/media?parent=4824"}],"wp:term":[{"taxonomy":"category","embeddable":true,"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/categories?post=4824"},{"taxonomy":"post_tag","embeddable":true,"href":"https:\/\/jeunediplome.net\/wp-json\/wp\/v2\/tags?post=4824"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}