{"id":9519,"date":"2021-10-01T12:29:46","date_gmt":"2021-10-01T10:29:46","guid":{"rendered":"https:\/\/www.lemonde.fr\/idees\/article\/2021\/10\/01\/la-transition-bas-carbone-implique-avant-tout-une-redistribution-des-emplois_6096736_3232.html"},"modified":"2021-10-01T12:29:46","modified_gmt":"2021-10-01T10:29:46","slug":"la-transition-bas-carbone-implique-avant-tout-une-redistribution-des-emplois","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/jeunediplome.net\/la-transition-bas-carbone-implique-avant-tout-une-redistribution-des-emplois\/","title":{"rendered":"\u00ab\u00a0La transition bas carbone implique avant tout une redistribution des emplois\u00a0\u00bb"},"content":{"rendered":"
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Tribune. <\/strong>Peut-on anticiper ce que sauver le climat impliquera comme transformations sur le march\u00e9 du travail ? Traditionnellement, les \u00e9conomistes repr\u00e9sentent le milieu naturel comme un stock de ressources dans lequel on peut puiser. Avec la crainte ancestrale de se heurter au mur de la raret\u00e9 : pas assez de terres (Malthus), pas assez de biens agricoles (Ricardo), pas assez de charbon (Jevons), pas assez d\u2019\u00e9nergies fossiles (Club de Rome, rapport Meadows)\u2026 Et \u00e0 terme, la fin de la croissance \u00e9conomique et l\u2019explosion du ch\u00f4mage.<\/p>\n

Face \u00e0 cette crainte, les \u00e9conomistes n\u00e9oclassiques ont construit un contre-argumentaire bas\u00e9 sur la capacit\u00e9 du syst\u00e8me marchand \u00e0 toujours repousser le mur de la raret\u00e9. Le spectre du manque serait chaque fois d\u00e9jou\u00e9 par la capacit\u00e9 du syst\u00e8me \u00e0 trouver des substituts aux ressources qui, devenant rares, voient leurs prix relatifs augmenter, ouvrant la voie \u00e0 \u00ab une croissance infinie dans un monde fini \u00bb.<\/p>\n

Article r\u00e9serv\u00e9 \u00e0 nos abonn\u00e9s<\/span><\/span> Lire aussi <\/span> \u00ab Une histoire des in\u00e9galit\u00e9s \u00bb: les catastrophes plus \u00ab efficaces \u00bb que les r\u00e9formes pour redistribuer les richesses<\/a> <\/span> <\/section>\n

Mais ce d\u00e9bat entre \u00e9conomistes se situait \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur d\u2019un paradigme solidement ancr\u00e9, dans lequel les crises proviennent de la raret\u00e9 et le bien-\u00eatre de l\u2019abondance. Aujourd\u2019hui, la crise climatique nous contraint \u00e0 d\u00e9passer ce paradigme. Elle n\u2019est pas une crise de la raret\u00e9, mais du trop-plein de gaz \u00e0 effet de serre, qui r\u00e9sulte de notre addiction aux \u00e9nergies fossiles, bien trop abondantes au regard de ce que peut contenir l\u2019atmosph\u00e8re sans risque de d\u00e9r\u00e8glement climatique.<\/p>\n

Pour ce faire, les \u00e9conomistes doivent op\u00e9rer une r\u00e9volution mentale. La nature n\u2019est pas r\u00e9ductible \u00e0 ce stock de ressources o\u00f9 puiser. Elle assure, en premier lieu, un ensemble de fonctions r\u00e9gulatrices pour lesquelles nous n\u2019avons pas de substitut. Ces fonctions r\u00e9gulatrices sont autant de biens communs qu\u2019il nous faut prot\u00e9ger.<\/p>\n

Double mouvement<\/h2>\n

Dans son essai sur l\u2019entropie, publi\u00e9 en 1971, The Entropy Law and the Economic Process<\/em>, l\u2019\u00e9conomiste am\u00e9ricano-roumain Nicholas Georgescu-Roegen (1906-1994) fut le premier \u00e0 introduire cette vision pr\u00e9monitoire d\u2019une subordination de l\u2019\u00e9conomie aux fonctions r\u00e9gulatrices assur\u00e9es par le milieu naturel. A l\u2019\u00e9poque, il ne disposait pas des travaux scientifiques qui permettent aujourd\u2019hui de mieux cerner les fronti\u00e8res plan\u00e9taires \u00e0 ne pas d\u00e9passer : couche d\u2019ozone, climat, cycle de l\u2019azote, cycle de l\u2019eau, biodiversit\u00e9\u2026<\/p>\n

Cela implique de reconfigurer le syst\u00e8me \u00e9nerg\u00e9tique en acc\u00e9l\u00e9rant la transition vers un mod\u00e8le lib\u00e9r\u00e9 de sa d\u00e9pendance aux \u00e9nergies fossiles. Il s\u2019agit d\u2019une rupture sans pr\u00e9c\u00e9dent historique. Depuis un si\u00e8cle et demi, on ne cesse d\u2019empiler les sources d\u2019\u00e9nergie dans une logique additive. La transition bas carbone exige de basculer vers une logique substitutive, o\u00f9 les sources d\u00e9carbon\u00e9es chassent les fossiles du syst\u00e8me.<\/p>\n

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Tribune. Peut-on anticiper ce que sauver le climat impliquera comme transformations sur le march\u00e9 du travail ? Traditionnellement, les \u00e9conomistes repr\u00e9sentent le milieu naturel comme un stock de ressources dans lequel on peut puiser. Avec la crainte ancestrale de se heurter au mur de la raret\u00e9 : pas assez de terres (Malthus), pas assez de biens agricoles<\/p><\/div>\n