Dans le Jura, le tissu industriel souffre mais ne rompt pas

Dans le Jura, le tissu industriel souffre mais ne rompt pas

Une manifestation d’employés de MBF Aluminium à Saint-Claude, dans le Jura, le 15 octobre.

Jamais on ne croirait que cet entrepôt anodin aux confins du Jura et de l’Ain cache une usine d’outils de précision. Vincent, 56 ans, et Carine, 44 ans, font fièrement la visite, décrivant les techniques qui permettent de transformer de longues tiges d’acier en minuscules pointes effilées.

Lui, vingt et un ans d’ancienneté chez LMT-Belin, l’a formée elle, arrivée il y a deux ans et demi. Une reconversion après treize ans dans la grande distribution. « J’ai appris sur le tas, j’ai tout donné pour y arriver », confie-t-elle. Vincent balaye l’atelier du regard : « Tout ce savoir-faire perdu… Tuer une entreprise qui fonctionne, c’est choquant. » Car le groupe allemand LMT Tools, qui a racheté cette PME en 2001, la ferme malgré ses bons résultats pour relocaliser la production en Allemagne. Le 3 décembre, le groupe et les syndicats ont trouvé un accord entérinant les 80 licenciements, avec jusqu’à quatorze mois de congés de reclassement pour les plus de 50 ans, près de la moitié des effectifs. « Je vais devoir reprendre une formation » prévoit Vincent. « Le perçage par électroérosion, on n’en trouve pas par ici », s’inquiète Carine, qui craint de repartir à zéro.

Il faudra aller chercher plus loin, dans d’autres secteurs. Le Jura, département rural, est aussi le plus industrialisé de l’Hexagone en proportion du nombre d’emplois salariés (33 % contre 13,3 % en France). Mais ici aussi, les sous-traitants de l’aéronautique et de l’automobile connaissent une forte baisse d’activité.

« Exode »

En parcourant 20 km par le parc naturel régional du Haut-Jura, on rejoint Saint-Claude, petite ville encaissée entre les montagnes. « Usine en danger » dit la banderole le long de la fonderie MBF Aluminium qui fait des pièces pour moteurs thermiques. Le Covid-19 a aggravé une situation financière compliquée, avec une dette fiscale et fournisseurs de près de 10 millions d’euros. En redressement judiciaire, la société a jusqu’au 18 janvier pour trouver un repreneur. 260 emplois sont en sursis, 300 avec les intérimaires. « A terme, c’est de l’exode vers les grandes villes, et la disparition des services publics ici », souligne Nail Yalcin, délégué CGT. La ville a perdu plus de 2 000 habitants en dix ans. Sa maternité a fermé en 2018.

« Il ne faudrait pas que cette main-d’œuvre très qualifiée parte en Suisse », s’inquiète Jean-Pierre Parizon, président de la CCI

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LJD

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